[CLOS] [Elijah/Angie] En visite à l'hôpital...

Aujourd'hui, on était mardi. Habituellement, le mardi, c'était mon jour de traitement. Mais depuis que j'avais appris que mon traitement n'était plus efficace et donc terminé, cela me faisait un après-midi de libre. Pendant les séances de chimio, je me retrouvai avec les autres malades et on lisait des livres ensemble. Enfin, moi je lisais, eux ils écoutaient. Quand je leur proposais de changer de lecteurs, ils répondaient tous que je m'en sortais très bien, que ce n'était pas la peine de changer. Et moi, après tout, j'aimais bien lire.

Aujourd'hui donc, pas de traitement pour moi, mais j'avais décidé de continuer à venir, pour continuer les lectures à voix hautes avec mes "collègues de chimio". J’apportais avec moi le livre que je voulais lire avec eux. Je l’avais choisi parce que c’était un peu notre histoire à nous aussi. Il s’appelait « The fault in our stars » et il parlait de cancer. Je savais que mes camarades seraient un peu réticents, au début, et puis ils se prendraient à l’histoire, ils apprécieraient. Parce que ça parlait du cancer, mais c’est quand même une histoire gaie, lumineuse. En tous cas moi, j’avais adoré. Peut-être parce que le personnage principal, Hazel Grace, était comme moi : malade et condamnée. Moi j’avais de la chance encore, je ne me trimbalais pas une bouteille d’oxygène, pas comme elle, pas le même cancer. Et elle était plus jeune que moi, nul doute qu’elle n’attendrait jamais mon âge, mais au fond, on était plus ou moins semblables. C’était aussi pour ça que j’avais choisi cette histoire.

Alors on était là, installés dans notre salle de chimio, J’avais pris une chaise et je m’étais mise de façon à ce que tout le monde m’entende. On n’avait pas fermé la porte de la salle. On ne la fermait jamais. Souvent les infirmières s’arrêtaient pour m’écouter lire, passer un moment avec nous. Tout le monde disait que j’avais une voix agréable à écouter. Moi je n’en savais rien, je ne l’entendais pas de la même façon qu’eux.  

« - Un jour viendra, ai-je dit, où nous serons tous morts. Tous. Un jour viendra où il ne restera plus aucun être humain pour se rappeler l'existence des hommes. Un jour viendra où il ne restera plus personne pour se souvenir d'Aristote ou de Cléopâtre, encore moins de toi. Tout ce qui a été fait, construit, écrit, pensé et découvert sera oublié et tout ça, ai-je ajouté avec un geste large, n'aura servi à rien. Ce jour viendra bientôt ou dans quelques millions d'années. Quoi qu'il arrive, même si nous survivons à la fin du soleil, nous ne survivrons pas toujours. Du temps s'est écoulé avant que les organismes acquièrent une conscience et il s'en écoulera après. Alors si l'oubli inéluctable de l'humanité t'inquiète, je te conseille de l'ignorer. C'est ce que tout le monde fait. »

La séance était terminée, je me levai, les embrassai un à un et sortit de la pièce pour rentrer chez moi. En passant la porte, je ne pus m’empêcher de penser que, pour une fois, je la franchissais seule, sans avoir besoin de soutien. David n’était d’ailleurs même pas là pour m’accompagner. Dommage dans un sens, il aurait bien aimé l’histoire d’Hazel Grace. Enfin… disons plus tôt que ça lui aurait certainement permit de comprendre certaines choses, de voir ma vie et mon cancer avec mes yeux à moi. Il faudrait que je lui dise de le lire.

Il n’était pas bien tard, mais la journée avait été bien remplie. Elijah s’était levé tôt ce matin là, avait prit la route des bancs, puis, l’après-midi venu, il avait profité du fait de ne pas travailler pour se mettre à une de ses nouvelles résolutions. La peinture urbaine.
Tout s’était bien déroulé et mine de rien, ça lui faisait un bien fou. Ces derniers temps, il avait besoin de se vider la tête.
Tout s’était bien déroulé jusqu’à ce qu’un groupe des rues de la ville basse vienne à trainer par ici et le voit en pleine action. Il avait bien essayé de fuir et il avait réussi d’ailleurs. Mais son bras s’était prit dans le grillage et il avait eu une grosse coupure en conséquence.

Il avait hésité. Retourner à la maison et penser ses plaies seul ou se rendre à l’hôpital pour qu’un professionnel s’occupe de ça et qu’il puisse en ressortir sans problème.
Il opta donc pour la seconde solution.
Il avait passé plus d’une heure là dedans quand son bras fini bandé et proprement nettoyé. Il s’apprêtait à quitter l’établissement quand il croisa du coin de l’oeil un visage connu. Il hésita. Mais finalement se dirigea vers elle, replaçant la sangle de son sac a dos un peu lourd.
Il arriva derrière Angie et s’éclairci la gorge.

- Je vois que je ne suis pas le seul à trainer par ici aujourd’hui, ça fait plaisir.

Avant même qu’elle se retourne, il souriait déjà de toutes ses dents. Mine de rien, depuis qu’ils avait quitté la ville médiane l’autre nuit, il n’avait plus eu de contact avec elle et le fait de la croiser par hasard ici même était plus que bienvenu pour lui qui chercher a s’évader.

Je marchais dans le couloir, perdue dans mes pensées. Lorsque j’avais expliqué aux autres que je ne suivrais plus le traitement et le pourquoi du comment, ils s’étaient tous montrés si compréhensibles, si gentils. Et pourtant, j’avais vu dans leur regard quelque chose qui me faisait mal. Un peu de pitié, ils étaient tous tristes pour moi. Eux, ils s’en sortiraient, moi pas.

J’entendais encore leurs voix dans ma tête, leur sollicitude. C’était gentil de leur part, bien sûr, mais j’aurais préféré qu’ils ne disent rien. Mais comment réagir quand on vous annonce un truc comme ça ? J’entendis alors une voix connue qui me ramena sur terre. Une voix connue oui, mais durant les quelques secondes avant que je ne tourne la tête, je ne l’avais pas encore associé à son possesseur. Mon visage s’éclaira tandis que je reconnaissais Elijah et je lui adressai un franc sourire. Je ne l’avais pas revu depuis l’autre soir. Pour être honnête, je n’avais pas non plus vraiment pensé à lui depuis. Il était gentil pourtant, je l’aimais bien. Mais j’étais du genre à aimer tout le monde, difficile de se souvenir des quelques centaines de personnes qu’on apprécie à un moment ou à un autre de notre vie.

- Hey ! Bonjour. Mais qu’est-ce que vous faites-là ? Vous venez souvent ici ?

« Question idiote ma fille, t’es dans un hôpital. Qui d’autre à part toi, viendrait régulièrement dans un hôpital ? A part ceux qui ont une maladie qui nécessite des soins constants bien sûr ».

Ce qui ne semblait pas être le cas d’Elijah. Mais après tout, moi aussi j’avais l’air en pleine forme la majorité du temps.

- Je veux dire… J’espère que vous n’êtes pas malade…

Il n’en avait pas l’air.

- … Ni un de vos proches.

La réaction d’Angie le fit sourire de plus belle. Le genre de sourire qui s’étend jusqu’aux oreilles.
Il haussa les épaules et montra les couloirs d’un air neutre.

- J’aime la lumière ici. Tout ces néons… c’est si beau…

Il rit légèrement et prit son sac par une hanse avant de faire un mouvement sec de l’épaule pour faire tomber sa veste en jean qui lui couvrait les épaules. Il dodelina légèrement du menton dans la direction du pansement qui lui recouvrait la peau.

- J’ai cru que passer par dessus un grillage vieux de la dernière décennie était une bonne idée… Il n’en est rien, sachez le au besoin. Disons qu’entre le sang et la rouille… je me suis dis que venir par ici pour voir si je ne risquais pas de perdre mon bras était une bonne idée..

Il avait appuyé le dernier mot et le laissa trainer dans sa bouche pour accenter le coté évident de la chose. Il prit une inspiration pour lui renvoyer la question avant de se raviser, l’air faisant un son étrange dans le fond de sa gorge. Il se doutait de sa présence ici… elle lui avait clairement sous entendu la dernière fois. Il se contenta donc de rebondir.

- Donc non, Je ne suis pas vraiment habitué à ce genre d’endroit. La dernière fois que j’ai mis les pieds dans un hôpital, c’était après l’accident et pour veiller ma mère.

Il indiqua le panneau sortie du bout du doigt, les sourcils légèrement froncé comme si il doutait de ce qu’il lisait sur l’enseigne lumineuse au dessus de la porte.

- Vous pensez qu’on peut trouver une boisson digne de ce nom par ici ? Quelque chose avec de la taurine.

Je levai les yeux vers le plafond et la lumière artificielle qui éclairait le couloir. J'étais loin de trouver ça beau, mais au ton qu'avait Elijah, je ne tardai pas à comprendre que c'était juste une boutade. Je jetai alors un coup d'œil au pansement qu'il le montrait et haussai les épaules.

- On ne vous a jamais dit que le top du top pour passer un grillage sans se faire mal, c'est le blouson de cuir ? Ou éventuellement le blouson de jean mais il faut qu'il soit assez épais, sinon il se déchire. Mais le cuir c'est le mieux. Croyez-en mon expérience !

Un souvenir de mon adolescence me fit sourire. Avec Tom, mon meilleur ami et accessoirement, voisin et membre des Home Made, nous avions eu notre période un peu rebelle. On avait plus ou moins fait quelques bêtises. Rien de bien méchant au fond, mais à l'époque on se prenait pour des caïds.

A l'évocation de son accident, j'eus un sourire compréhensif et repris la parole.

- Bah vous savez, on finit par s'y faire à ces néons. Et à l'odeur aussi. J'ai toujours trouvé que les hôpitaux avaient une odeur spéciale, quand j'étais gamine, je croyais que c'était l'odeur de la maladie mais en fait, c'est juste l'odeur des produits qu'ils utilisent pour faire le ménage. C'est sûr que c'est pas un endroit très… gai, mais on y rencontre parfois des gens exceptionnels qui vous font oublier où vous êtes l'espace d'un instant.

Je tournai la tête vers le panneau sortie et réfléchis quelques secondes avant de répondre à sa question.

- Oh bah y'a la cafét' de l'hôpital ! Ils ont des tables, des chaises en plastiques et un super distributeur de boisson !

J'eus un petit rire puis je me repris.

- Non trêve de plaisanteries, y'a un bar au bout de la rue. Ils devraient avoir ce que vous cherchez. Et la déco est un poil plus sympa que celle de la cafét' quand même !

Il replaça sa veste en jean sur son épaule tandis qu’elle lui expliquait que la meilleur solution pour éviter ce genre de blessures, c’était le cuir. Il sourit de plus belle. L’idée le faisait toujours sourire. Il savait que c’était la meilleur solution.
Peut-être qu’il allait devoir penser à des tenues plus pratique pour ses sorties à l’avenir ? Des images lui passèrent en tête et il pouffa de rire, comme il le faisait toujours, lui qui avait l’esprit qui travaillait à mille à l’heure.

Il siffla quand elle lui décrivit la cafétéria de l’hôpital. On sentait toute la feinte admiration qu’il y avait dans ce son, mais avant même qu’il réussies à répondre par une boutade du même niveau, elle reprit dans le vif du sujet en lui donnant une véritable direction pour ce qu’il cherchait. Il leva son pouce vers elle.

- C’est parfait. Je vais faire de vous ma fournisseur officielle de bonnes adresses dans ce cas là !

Il lui posa une main dans le dos pour l’inviter à le suivre et prit les devant de deux pas juste après, se dirigeant vers la sortie. Elle avait parlé de l’hôpital, de ses lumières et ses odeurs et même si il savait déjà tout ça, il ne pouvait pas s’empêcher d’être mal à l’aise dans ce genre d’endroit et il préférait ne pas savoir pourquoi… enfin, il préférait ne pas y réfléchir plutôt.

Après une petite minute, ils arrivèrent à l’extérieur. Elijah attendit d’être à plusieurs dizaines de mètres de l’endroit pour écarter les bras et respirer un grand coup, comme une personne qui sortait d’une grosse apnée.
Il regarda vers les deux coins de la rue et fini par tomber sur ce qu’il pensait être l’enseigne du bar dont parlait Angie. Mais il lui fit quand même signe en direction de la gauche.

- Après vous, c’est vous qui connaissez les bonnes adresses du coin, je vous fait confiance.

Sa remarque me fit rire.

- Oh merci ! C’est un très grand honneur. Il faudra que je vous offre mon guide touristique un jour. Il s’appelle « Le Routard d’Angie de Mégalopolis ». Existe en édition ville basse et ville médiane. Pour la Haute, faut attendre encore un peu !

J’avais pris mon air le plus sérieux du monde. Je m’étais mise à marcher, le dos bien droit, la tête haute, dans une imitation parfaite de la femme d’affaires à succès. Mais je ne pus garder cette pose bien longtemps. Au bout de cinq pas, je pouffai à nouveau et reprenait mon attitude naturelle, plus décontractée.

- Mais vous savez, mes bonnes adresses, ce n’est pas vraiment objectif, c’est juste les endroits que j’aime bien. Mais si ça se trouve, il y en a plein qui ne vous plairaient pas. Alors je préfère vous prévenir tout de suite, je ne sais pas si je suis très fiable en tant que carnet de bonnes adresses !

Nous avions atteint la sortie de l’hôpital et, de l’autre côté des portes, la rue. Avec sa lumière naturelle, son air pas franchement pur mais libéré des odeurs de produits nettoyants antiseptiques, antibactériens et anti-je-ne-sais-pas-quoi-encore. La réaction d’Elijah, qui prit une profonde inspiration comme s’il s’était retenu de respirer pendant qu’il était à l’intérieur me fit sourire.

- Et bah, c’est vraiment pas votre truc les hôpitaux. Vous voyez, je suis pas fiable comme carnet de bonnes adresses parce que… bon ok, c’est pas non plus le truc que je préfère, mais je continue à y venir toutes les semaines, même si mon traitement est fini !

Je m’arrêtai net et farfouillait dans ma mémoire. Etait-ce la première fois que je lui parlais de ma maladie ? J’avais un vague souvenir de lui avoir dit que j’allais mourir, mais je ne me souvenais pas de lui avoir expliqué pourquoi.

Il m’indiqua le bout de la rue, à gauche, là où se trouvait effectivement le bar. On pouvait en voir l’enseigne de là où on était. Je hochai la tête.

- Oui c’est ça.

Et j‘entrainais Elijah à ma suite dans sa direction. Le bar n’avait rien de spécial vu de l’extérieur. A l’intérieur c'était autre chose. Le patron avait essayé de lui donner un air de saloon. Il y'avait des peaux de vaches tannées sur les murs, des stetsons posés par-si par-là sur des étagères. Une botte de paille dans un coin et un taureau mécanique pour le rodéo. Niveau déco, c'était too much, mais malgré tout, l'endroit était chaleureux. Sûrement parce que ceux qui y travaillaient avaient le sourire en toute occasion.

- Bon il paye pas de mine comme ça, mais leurs boissons sont pas mauvaises et le patron est super sympa.

Comme pour confirmer mes dires, le patron se fendit d’un large sourire en nous voyant entrer.

- Salut Angie !
- Salut Earl, on peut prendre la table du fond ?
- Pas de soucis !


Je venais souvent ici, avec David, avant d’aller à l’hôpital. Le bar faisait aussi brasserie. On y dégustait un excellent hamburger-frites et ensuite on filait à la séance de chimio. Je guidai Elijah jusqu’à la dite table. La meilleure de tout l’établissement selon moi. Enfin, à vrai dire, je n’avais jamais essayé les autres. Les premières fois qu’on était venus avec David, c’était la seule table de libre et puis au fil du temps, c’était devenu « notre » table.

- Alors, vous en pensez quoi ?

Il avait suivi, bien entendu, ce qu’elle venait de lui dire. Elle lui avait dit en effet qu’elle allait mourir et quand il avait insisté sur le fait que tout le monde allait mourir et qu’elle avait contré sa remarque par l’imminence et l’inévitabilité de la sienne, il avait su lire entre les lignes. Ce qu’elle venait de lui dire ne faisait que confirmer ce qu’il avait cru comprendre. Donc il ne releva pas et préféra la suivre en sifflotant un air de son invention qu’il avait en tête depuis le levé.
Quand ils arrivèrent devant la porte, il chercha à voir l’interieur depuis les vitres, mais n’y parvint pas, ce ne fut que quand ils entrèrent à l’intérieur que son sourire refit son apparition.

Il laissa Angie discuter avec la personne qui devait être le patron, Earl et il s’installa a la table qui était là leur du coup.
Il continua a regarder les alentours et quand elle lui demande ce qu’il en pensait, il déposa lentement son sac qui fit un bruit métallique en touchant le sol et retira lentement sa veste en jean pour libérer son bras avant de répondre.

- C’est original… vous savez quoi ? J’ai mangé dans un endroit dans la ville haute…

Il posa son index et son pouce sur son menton, cherchant le nom avant de reprendre quand il vit que ça ne lui revenait pas aussi facilement qu’il l’espérait, mais au moment d’ouvrir la bouche il s’en souvint.

- Le Waikiki club sandwich, c’est un restaurant sur le thème hawaïen perdu entre les buildings de la ville. J’y passais quand j’avais une pose pendant mon stage chez la Kings. C’était vraiment amusant et ça m’y fait penser.

Il releva son pouce de nouveau.

- J’adore ce genre d’atmosphère originale.

J’écarquillai les yeux, plus d’admiration que de surprise.

- Vous êtes déjà allé dans la ville Haute ?

Puis je me repris, sans lui laisser le temps de répondre.

- Ah bah oui, bien sûr. La king… forcément, que vous êtes allé dans la ville Haute. Le pire, c’est que je le savais, vous me l’aviez déjà dit.

Etonnant que je me rappelle ce détail insignifiant quand j’oubliais tant de choses plus importantes. La dernière en date, c’était l’endroit où j’avais posée mes clefs de voitures. Je savais que je ne les avais pas perdues, j’avais barré ma voiture avant d’entrer dans la maison hier soir. Elle était donc forcément quelque part, dans le salon, la cuisine ou même ma chambre. Mais où ? C’était un grand mystère. Du coup, comme j’avais également oublié l’endroit où j’avais soigneusement rangé le double (il est des choses qu’on range parfois trop bien), j’avais dû prendre le bus pour venir à l’hôpital. Non pas que ça me dérangeait en soi, mais ça m’embêtait quand même cette histoire de clefs. Bref, revenons à nos moutons.

- Oui moi aussi j’aime bien. Ce lieu a une âme, une histoire. C’est plus qu’un simple bar. C’est…

Je m’arrêtai un instant, cherchant les mots appropriés. Mais je ne les trouvais pas. Il y’avait quelque chose de marrant chez moi, j’avais toujours l’impression que les mots pour exprimer ce que je ressentais vraiment n’existaient pas. Ils étaient parfois plus forts ou au contraire pas assez forts pour ce que je voulais dire, mais je ne connaissais pas le mot pour le juste milieu. Et bah c’était pareil avec ce bar. Je finis par laisser tomber et haussai les épaules.

C’est le moment que choisit Earl pour passer prendre nos commandes. Il était marrant Earl. Cowboy jusqu’au bout avec son stetson, sa chemise à carreaux, son jean, sa ceinture à grosse boucle et ses santiags avec un éperon qui sonnait à chaque pas qu’il faisait. On aurait pu le croire tout juste descendu de son cheval.

- Qu’est-ce que vous prenez ?

Il allait lui faire la remarque quand elle se reprit elle-même. Il se contenta alors d’acquiescer et reprit son étude de la carte qu’il avait entre les mains. Il avait faim, et soif… mine de rien, il était debout depuis un moment maintenant et il n’avait rien prévu en partant que les bombes qu’il avait dans le sac. La prochaine fois, il faudrait qu’il se prépare mieux que ça.
Il fit remarquer une chose à Angie cependant.

- Vous n’avez jamais mis les pieds dans la ville haute ? Je veux dire, même pas par curiosité ? C’est un endroit bourgeois, mais justement, c’est intéressant de voir ces trois faces de notre monde concentré en une seule ville. Et si vous avez faim le jour ou vous allez là-haut, je vous donnerais l’adresse de la sandwitcherie, ça valait vraiment le détour.

Elijah ou comment être émerveillé par des détails que tout le monde trouve anodin.
Quand elle ne termina pas sa phrase, il attendit un instant et fini par proposer quelque chose en tendant le doigt vers elle.

- Il a une âme ?

Quand Earl arriva vers eux, il leva les yeux et lui sourit de toute ses dents, c’est vrai qu’il était original cet homme, mais c’était agréable justement. Comme pour Maybel.
Il se passa une main sur la nuque et commanda pour lui.

- Pour la Demoiselle, je en sais pas ce que c’est, mais pour moi, ça sera quelque chose de rapide, surprenez moi et une boisson qui puisse me redonner un coup de boost.

Il leva les yeux vers elle en attendant qu’elle fasse sa propre commande.

Je me mis à jouer avec la carte de bar qui nous attendait déjà sur la table.

- Si bien sûr, mais… juste une fois en fait, il y’a quelques jours. Un mec que j’ai rencontré au McLaren m’avait invitée à un vernissage. C’était… disons que ce n’est pas forcément le meilleur moyen de faire ses premiers pas dans la Haute. Parce que là… non seulement j’ai fait mon entrée dans la ville Haute, mais aussi dans la Haute Société et… Bref, ce n’est pas mon truc. Et avant ça… je suis curieuse d’y aller, bien sûr, mais je n’avais encore jamais trouvé l’occasion, ni le temps.

Je lui fis un sourire en coin.

- J’en ai pas l’air, mais je suis une fille assez débordée !

Alors qu’il me proposait une fin pour ma phrase laissée en suspens, je me mis à rire.

- Oui, ça je l’ai déjà dit. Je cherchais un autre mot en fait. Mais il ne doit pas exister. Ou alors, je ne le connais pas tout simplement, parce qu’à vrai dire, je n’ai pas avalé de dictionnaire à ce que je sache ! Même si j’avais un très bon niveau en vocabulaire.

Earl nota la commande d’Elijah et se tourna vers moi. C’est vrai que j’avais un peu faim moi aussi.

- Un burger avec des frites et un coca s’il te plait.
- Ok, je vous apporte ça dans 5 minutes !
- Merci Earl !

Le patron s’éloigna en nous laissant tous les deux. J’en profitai pour me pencher vers Elijah et lui dire sur le ton de la confidence :

- Vous êtes sûr que vous voulez être surpris ? Et s’il se ramenait avec… j’en sais rien moi, un truc hyper épicé ou un truc… avec un goût bizarre ? Parce que je peux vous dire que certains des plats qu’il sert ont franchement des drôles de tronches. Cela dit c’est sûrement très bon hein, parce que j’ai encore vu personne foncer vers les toilettes ou partir en courant !

Bon je savais bien qu'Earl ne servait pas de plat particulier, juste des trucs typiquement américain : du poulet roti, des épis de maïs, de la purée de patates douces, des burgers... rien de vraiment bizarre en fait ! Mais je voulais voir si j'arrivais à faire peur à Elijah.

Eli l’écouta. Les vernissages, il n’en avait jamais fait, mais il connaissait. Il répondit donc une fois qu’elle eu fini.

- Il faut aimer l’architecture, parce qu’on rentre rarement dans les bâtiments sans bonnes raisons là-bas. Mais rien que pour la beauté des bâtiments, ça vaut le coup. Et les petits endroits originaux.

Quand elle lui signifia qu’elle l’avait déjà dit et qu’elle ne trouvait pas les bon mots, il haussa les épaules et joua avec la carte une seconde.

- Ce que je voulais dire, c’est que pour moi, une âme ça suffit amplement à comprendre ce que vous vouliez dire. Voila tout.

Elle lui fit sa boutade sur les plats d’Earl et il fit semblant d’hésiter un instant avant de pointer son index sur son propre torse, le sourcil gauche loin au milieu de son front.

- Je suis de la Nouvelle Orléans, dit-il en Français avec un accent du French Quarter, on parle des plats cajuns si vous voulez… mon palais est une forteresse. Je ne demande que ça, qu’il sorte sa meilleur arme contre moi.

Il laissa un blanc et éclata d’un rire franc. Il avait dit ça pour plaisanter, mais c’était vrai… il avait eu l’habitude des plats de chez lui et ça lui fit penser à quelque chose.

- Par ici… les gens ne sont pas très épices malheureusement. Les plats manquent de profondeur à mon gout. Mais disons que c’est différent voila tout. Pas pour le pire soit dit en passant.

Je hochai la tête. Il n’avait pas tort, mais j’avais oublié de préciser une chose à propos de ce vernissage.

- En fait, c’était pour une exposition d’œuvres d’art. Uniquement des artistes spécifiques. C’était très intéressant.

Et puis Elijah m’expliqua ce qu’il avait voulu dire et je ne pus m’empêcher de sourire.

- Oui, c’est vrai, c’est suffisant. Vous avez raison.

Manifestement, je n’avais pas réussi à lui faire peur. Pire, Elijah semblait ravi à la perspective qu’Earl lui apporte un de ces plats bizarres que je lui avais décrits. En fait, il avait même commencé par me répondre dans une langue étrangère. Je ne connaissais pas le français, mais j’en reconnaissais plus ou moins les sonorités et puis, il venait de la Nouvelle Orléans. Et la Louisiane, c’était une ancienne colonie française non ? Donc rien d’étonnant finalement à ce qu’il parle français. Je trépignai sur sa chaise. Le Français, j’aurais donné n’importe quoi pour l’apprendre. Je trouvais que c’était une langue si belle, si chantante, et à la fois si sophistiquée… Je me trompais peut-être mais on ne m’avait jamais démentie. Malheureusement, l’établissement dans lequel j’avais fait mes études ne proposait que l’espagnol et le latin. C’était marrant le latin, mais on n’avait pas vraiment l’occasion de beaucoup le parler non ?

Bref, je posai mes coudes sur la table et appuyai ma tête dans mes paumes et soupirai. Je résistai à l’envie de lui demander de reparler français et enchainai sur ses dernières paroles.

- Ouais, c’est vrai que gustativement parlant, on ne mange pas super épicé par ici. Mais bah, c’est bon quand même.
- Ravi de te l’entendre dire Angie ! Parce que je peux te dire que sinon, je t’aurais fait sortir d’ici à coup de pieds au derrière !

Earl arrivait justement avec nos plats. Sa répartie me fit rire.

- Tu n’oserais pas !
- Essaie un peu pour voir !
- Non pas aujourd’hui, je ne suis pas toute seule !

Earl pouffa et posa nos assiettes devant nous avant de s’éloigner en nous souhaitant un bon appétit. Moi j’avais ce que j’avais demandé, un burger, des frites et un coca. Quand à Elijah, il avait finalement la même chose que moi. Le burger, c’était la spécialité d’Earl. Et bon, il n’était pas super épicé mais bon sang qu’il était bon. Le meilleur burger que j’avais jamais mangé.

- Dites, si je peux me permettre d’être indiscrète. Vous faisiez quoi pour vous retrouver à escalader un vieux grillage comme ça ?

Elijah lança un regard interrogateur à la jeune femme. Quand on parlait d’art, il était toujours très curieux, quel genre de peinture et d’artiste spéciaux pouvaient avoir leur place dans la ville haute pour que ce soit si intéressant que ça ? Il posa ses avant-bras sur la table avant de lui poser la question.

- Spécifique ? C’était une façon de peintre peut répandue ?

Quand Earl arriva, il lui prit son plat en souriant. La remarque et l’archange qui s’ensuivit laissait à penser qu’ils avaient l’habitude de se voir plus que régulièrement.
Il rit dans sa barbe, mais ne dit rien. Il laissa tout ça passer jusqu’à ce qu’Angie posa la question qu’il redoutait.

Il la prit tout de même avec son ombre de sourire avant de tapoter du bout du pied les bombes de peintures dans son sac, ces dernières faisant un bruit de fer blanc qu’on frottait les un contre les autres. Il laissa planer le mystère une seconde, cherchant dans les yeux d’Angie si elle se demandait ce que c’était ou pas, mais il vendit la mèche bien vite.

- A vrai dire… je pense que vous avez eu un indice la dernière fois avec la peinture sur le mur… j’ai dis que je voulais me mettre à faire de la peinture de rue et bien j’ai commencé. Et disons que mon message n’a pas dû plaire à certaines petites frappes du quartier qui ont décidé de me donner une leçon.

Il sortit le bonnet qu’il avait souvent sur la tête et le montra à Angela.

- Disons qu’ils en avaient après moi, alors j’ai pris la poudre d’escampette sans réfléchir à l’endroit où j’allais me rendre et voila ce que ça a donné.

Il montra du doigt ses bandages en faisant la moue.

Sa question me laissa perplexe quelques secondes. C’était comme si mon cerveau s’était arrêté, un beug, avant que je comprenne.

- J’ai dis « spécifiques » ? Ah désolée, je voulais dire « positifs ». Mon cerveau a des ratés parfois, je pense une chose et j’en dis une autre, totalement différente. Comme si la connexion entre la zone de pensée et la zone de parole était défectueuse ! Et c’est pas la seule chose qui déconne malheureusement !

Je secouai la tête en souriant. Lorsqu’il tapota son sac avec son pied, j’entendis des objets métalliques s’entrechoquer. Mais j’aurais bien été incapable de dire ce que c’était. Je fronçai les sourcils pour essayer de deviner. La première chose qui me vint à l’esprit, c’était des tasses en fer blanc, comme celles qu’utilisaient les pionniers, mais je doutais sincèrement que ce soit ça. Heureusement, Elijah ne me laissa pas chercher longtemps.

- Ah mince. J’espère au moins qu’ils vous ont laissé finir. La prochaine fois, vous devriez m’emmener avec vous. Je suis un GPS certes, mais j’ai aussi une arme secrète !

Je lui adressai un clin d’œil et attaquai mon burger, sans en dire plus. J’aimais jouer les filles mystérieuses, même si en réalité, je n’avais de secrets pour personne. Enfin, presque !

- Alors, c’est pas le meilleur burger de toute la planète ?

Je lui adressai un franc sourire. Dire que c’était le meilleur burger de la planète, c’était franchement exagéré. Déjà, parce que je n’avais jamais goûté de burger dans une autre ville que Megalopolis donc… Et en plus de ça, j’étais loin d’avoir fait tous les restos de la ville ayant des burgers à leur carte. Mais, c’était le meilleur de tous ceux que j’avais goûté en tous cas.

La remarque le fit sourire. Jaune, mais le fit sourire quand même car il voyait parfaitement le problème. Il se contenta de secouer la tête quand elle rajouta qu’il n’y avait pas que ça qui déraillait chez elle. Mais le point des positifs le fit tiquer, il leva les yeux vers elle, les couverts dans la main tandis que Earl était retourné à ses occupations.

- Je n’arrive pas a définir si je trouve ça bien ou pas. L’art est une chose, malheureusement, c’est tellement subjectif que de temps en temps, j’ai l’impression que c’est plus les artistes qui intéressent les gens que les oeuvres en elles mêmes. Comment le vivaient-ils ? Cette mise en avant je veux dire.

Angie lui envoya la pique amicale sur ses capacités à être une arme secrète et il sourit. Au moment où elle allait commencer à manger, il bloqua le couteau dans le plat avec son pouvoir. Pas longtemps, juste trois secondes, mais assez pour qu’il puisse lever les yeux vers elle avec un sourire interrogateur, comme si ce n’était pas de sa faute si elle ne pouvait plus bouger le couvert.

- J’y penserais, merci. Et oui… j’ai réussi en effet. Ils ne sont pas vraiment discret ces gens là. Ils se sont mit à crier comme des chiens sauvages avant même de pouvoir réellement voir ce que j’étais en train de faire…

Il rit à l’anecdote et s’attaqua a son propre plat avant de répondre à sa question. Il était bon, en effet, surement pas le meilleur, mais il était bon.

- Bien meilleur que la majorité des plats qu’on peut trouver en ville basse et médiane c’est certain. Mes compliments au chef !

Il avait dit sa dernière phrase assez fort pour qu’Earl puisse l’entendre.

Je suspendis mon geste un instant, prenant le temps de la réflexion avant de répondre.

- En fait, je crois qu'ils étaient plutôt partagés entre la gène et le contentement. Je veux dire, c'était une chance extraordinaire pour eux d'exposer ainsi leurs oeuvres dans la ville Haute. Ils ont pu se faire repérer par des spécialistes de l'art qui ont vraiment apprécié leurs oeuvres. Je crois que pour des artistes, il n'y a rien de mieux que la reconnaissance. Et en même temps, le fait de mettre en avant leur côté positif... c'est sûr, le message était clair : "oui ils sont positifs, et alors ?". Je crois que les organisateurs ont voulu mettre l'accent la dessus pour essayer de briser les barrières que certains négatifs élèvent encore. Et les artistes se sont pris au jeu, mais je crois qu'à leur place, ça m'aurait un peu gênée d'être mise tellement en avant, et déçue aussi qu'on s'intéresse à mon art juste parce que je suis positive. Du coup, c'est à double tranchant cette façon de procéder...

Je penchai la tête sur le côté et haussai les épaules.

- Enfin, selon moi.

Alors que je m'apprêtai à couper mon burger, je sentis une drôle de résistance. Comme si le couteau était coincé. Je forçai un peu et fronçai les sourcils. Mais la résistance ne dura que quelques secondes. Relevant les yeux sur Elijah, je surpris son petit sourire et compris alors ce qu'il s'était passé. Je posai mes couverts sur la table et saisis mon hamburger à pleine main.

- Allez-y, essayez de m'empêcher de manger maintenant !

J'allais mordre dedans lorsque je me ravisai et ajoutai quelque chose, au cas où.

- Et pas la peine de chercher, j'ai pas d'appareil dentaire !

Le compliment d'Elijah monta jusqu'aux oreilles d'Earl qui sourit.

- Merci ! Angie, il est sympa celui-là, tu peux le ramener quand tu veux !

Il l’écouta, les mains sur ses propres couvert, concentré autant sur ce qu’il mettait dans sa bouche que ce qui sortait de celle d’Angie. Quand elle eu fini, il releva les yeux vers elle et pencha la tête sur le coté.

- Je pense que si ils ont signé pour ça, c’est qu’ils étaient pleinement conscient de ça. Dieu sait que c’est difficile de sortir des quartiers où on a évoluer si longtemps. C’est une façon comme une autre de se mettre en avant et de sortir du lot, oui.

Il réfléchit à la conversation, enfin plutôt l’accrochage qu’il avait eu avec Maddie quelques jours plus tôt.

- C’est déjà bien qu’ils n’aient pas peur de se montrer comme étant différent, j’apprécie ce genre de façon de penser. A mon gout, beaucoup trop de gens ont encore peur de se montrer différent et veulent se fondre dans la masse…

Il prit le temps de manger un peut et reprit.

- Je comprend que ce soit nécessaire, les vieilles habitudes ont la peau dures et pour certains, c’est une obligation.

Quand elle posa ses couverts il la regarda, un sourcil haut.

- Sérieusement ? Je n’aurais pas de problème à le faire si j’en avais envie vous savez…

Il rit et quand Earl répondit à sa remarque, il leva une main vers lui pour le saluer. Il but une gorgée de son verre qui lui donna de léger frissons comme à chaque fois qu’il buvait quelque chose avec des bulles.

- Qu’avait-ils comme… dons ?

Je hochai la tête. Il n'avait pas tout à fait tort non plus. C'était un point de vue auquel je n'avais pas pensé. Moi, j'étais de la médiane alors autant dire que même si je ne vivais pas dans le luxe, je vivais bien. J'avais mes amis, ma famille, j'avais grandis dans un environnement stable. Je n'avais jamais vraiment ressenti le besoin de me mettre en avant, ou de changer quoique ce soit à ma façon d'être. Mais quand il parla de se démarquer, je tiquai un peu.

- Vous savez, il y'a "différent" et "différent". Je suppose qu'il y a des différences dont on peut être fiers, des différences qu'on n'a pas à cacher ou qu'on ne devrait pas avoir peur d'affirmer. Mais... je ne sais pas. Je ne suis pas positive donc je suis incapable de me mettre à votre place ou à la leur. Mais je sais en revanche que à ma façon, je suis différente. Alors maintenant, ça ne se voit plus. Mais il y a deux ans, quand j'ai commencé à perdre mes cheveux et que je me suis ramenée à la fac avec la tête complètement rasée...

Je me remémorai cette journée, la plus dure que j'avais eu à vivre je crois. Les gens me passaient à côté et me fixaient constamment. Je les voyaient chuchoter entre eux, s'éloigner instinctivement lorsque je passais trop près, comme s'ils avaient peur de moi.

- Le regard des gens peut-être très dur à supporter des fois.

Sa dernière question me prit de court. Pendant quelques secondes, je me demandai de quoi il parlait.

- Qui ça ? Les artistes ? Hormis celui d'être des artistes justement, je ne sais pas. Je n'ai pas vraiment eu l'occasion de leur parler. Ils étaient sans cesse accaparés par des gens de la Haute et... personnellement, je ne me sentais pas très à l'aise dans cet univers. Je pensais que j'arriverai à m'adapter facilement mais je me suis trompée. Du coup, je ne me suis pas vraiment attardée. J'ai pris le temps de bien regarder les oeuvres et je suis partie.

J'allais mordre à nouveau dans mon hamburger quand une question se mit à me trotter dans la tête.

- Non mais sans déconner, vous en seriez vraiment capable ? Je veux dire, juste en agissant sur le burger ou sur moi ? Parce que à moins de sentir le fer qui se trouve dans le steak, j'ai des doutes. Vous pourriez ordonner à ma ceinture d'aller se coller au plafond, ça me ferait pas lâcher mon hamburger pour autant !

Ca sonnait un peu comme un défi. Peut-être qu'inconsciemment je venais de lui en lancer un. Mais consciemment, je n'avais pas spécialement envie qu'il m'ôte ce délicieux repas de la bouche. J'avais trop la dalle !

Il l’écouta attentivement et une fois qu’elle eu terminé, il pointa la jeune femme du doigt en acquiesçant.

- J’ai eu un… désaccord avec une amie. A ce sujet justement. Je lui disais qu’on ne devrait pas avoir honte de ce qu’on est, se montrer sous notre vrai jour. Elle m’a dit que pour l’intégration, il était préférable de se montrer… négatifs. Mais je ne suis pas d’accord. Comment réussirions-nous à nous faire accepter si on faisait croire à tout le monde que nous sommes… normaux. Enfin, désolé… c’est un autre sujet qu’on devrait éviter à table.

Il rit en repensant à une phrase que sortait souvent son père à table en agitant sa fourchette dans tout les sens et criant qu’il y avait des sujets tabous a table et la politique était l’un d’eux. Mais en attendant la fin de sa phrase, il reprit légèrement son sérieux.

- Au moins, vous avez eu le courage de l’affirmer. Pas a le cacher. C’était surement très difficile à faire, mais c’est un choix que vous avez fait et vous devez en être fier. Voila ce que j’en pense. Si on n’apprend pas à supporter le regard des gens, on se cachera toute notre vie.

Quand elle lui parla de son passage éclair dans la haute société, il leva un sourcil, curieux à présent. Il ne s’imaginait pas la jeune femme devoir fuir devant des paires de cravates et des tapes dans le dos.

- C’était difficile à ce point ? Je veux dire, d’être dans un autre monde que le sien. Ils ont une étiquette à suivre et visiblement, certaines personnes n’arrivent pas à le vivre correctement. J’ai entendu Edward King en parler une fois à son bras droit. Il lui a dit que parfois, il préférerait ne pas avoir eu l’éducation qu’il avait eu, ça lui rendrait certains choix plus facile, ça m’a marqué.

Quand elle lui parla du Sandwich, il rit de nouveau et un bon moment ce coup-ci. Voila une flopée détails auxquels il n’avait pas réfléchi. Il fit non de la tête.

- Non, c’était une boutade. C’est peut-être quelque chose dont je suis capable. Mais je n’ai pas encore la perception nécessaire pour réussir ne serait-ce qu’à sentir ce genre de chose. Alors agir dessus…

- Vous savez, je crois que c’est à chacun de faire son choix. Certaines personnes sont prêtes à s’affirmer, d’autre non. L’important c’est d’être à l’aise avec ce qu’on est. Mais… je veux dire, être positif, c’est comme ça, vous n’avez pas le choix, vous ne pouvez pas le changer, c’est dans votre nature, point barre. Et cacher cette partie de vous-même, c’est comme si vous ne l’acceptiez pas. Comment on peut être bien dans sa peau si on refuse ce qu’on est au fond ?

Je levai les mains comme pour m’excuser.

- Attention, quand je dis vous, c’est pas « vous Elijah », c’est plutôt « vous les positifs »… même si cette expression me dérange. J’aime à penser que positifs et négatifs sont une seule et même entité même si nous avons chacun nos spécificités. Regardez nous, nous en sommes l’exemple parfait. Vous avez votre pouvoir, et j’ai… ma personnalité détonante ! Et…

C’était à mon tour de le pointer du doigt.

- On m’a appris que tant qu’on était entre personnes qui se respectent et qui sont capables de s’écouter, on peut parler de tout, tout le temps. Et je pense vous connaitre assez pour dire que vous en faites partie. Et vous savez quoi, vous devriez prendre ça comme un compliment parce que je n’en ai pas croisé beaucoup des gens comme vous.

Mais je le laissai changer de sujet. Surtout parce que j’avais dit tout ce que j’avais à dire et que je pensais qu’il ne servait à rien de tourner en rond de toute façon.

- C’est pas que c’était difficile, c’est juste que je ne me sentais pas à ma place dans leur monde. Je suis trop spontanée, trop familière. Eux, ils semblent être toujours sur la réserve, à faire attention à l’image qu’ils donnent. J’étais en décalage. Et puis, j’étais pas franchement à l’aise en robe de soirée et talons hauts. Je préfère mon bon vieux jean et mes baskets !

Et en réponse sa remarque sur ses capacités à m’empêcher de manger :

- Tant mieux, parce que franchement, j’ai tellement faim que je vous aurai certainement sauté à la gorge si vous aviez essayé encore une fois de m’empêcher de toucher à cet hamburger !

Le temps qu’il avait passé dans la rue aujourd’hui l’avait coupé de tout le reste. L’excitation de faire ce qu’il planifiait depuis tant de temps et enfin réussir à franchir le pas, ça lui avait fait oublier beaucoup de choses et la dernière remarque d’Angela lui rappella que lui aussi était mort de faim. Il leva sa fourchette comme un futur roi son épée et garda la pose une seconde.

- Amen à ça.

Le plat était bon, mais comme il le savait déjà, c’était la boisson qui lui fit le plus de bien. Elle lui coulait dans le ventre et il se sentait déjà plus d’attaque, l’esprit plus vif. Il savait que c’était purement placebo, mais c’était bienvenu en tout cas. Il joua un instant avec un morceau du plat et fini par relever les yeux vers elle.

- Je ne sais pas si je vous l’ai déjà dis. Mais la personne qui se rapproche le plus de ma famille ici, en ville travaille pour la police elle aussi. Comme votre frère David. Qui sait, ils peuvent se connaitre ! J’étais en train de penser que ça serait amusant.

Il se rappela de la dispute qu’il avait eu avec elle et perdit de nouveau son sourire, mais ce dernier s’imposa quelques secondes plus tard comme si ce n’était pas naturel pour lui de ne pas être comme ça.
Il avait été sérieux pendant tant de temps…
Une chose que lui dit Angela lui revint en tête et il se sentit mal à l’aise. Elle lui faisait confiance et il trouvait ça touchant. Mais la réciprocité avait ses limites. Il y avait des choses qu’il lui cachait et qu’il n’arrivait pas à mettre en place dans sa tête pour pouvoir en parler. Il leva les yeux un instant vers elle. Observant la Demoiselle avant d’avoir un frisson et se replonger dans son plat pour le finir lentement. Après tout, il ne pouvait pas lui dire ces choses là entre le plat et le dessert. Et il n’avait d’ailleurs pas de raison de lui en parler tout court. Une fois arrivé à cette conclusion, il se laissa retomber sur le dossier de sa chaise et soupira d’aise.

- Et bien ça valait le coup de faire confiance à Earl pour le plat. Il était vraiment bon, en effet !

Nous gardâmes le silence un moment, le temps de manger un peu. Parce que mine de rien, discuter, ça ne nourrit pas beaucoup. Lorsqu’il reprit la parole, je venais juste de prendre une nouvelle bouchée. Je pris le temps d’avaler avant de répondre. On m’avait appris à ne pas parler la bouche pleine. Je n’avais certes pas la même éducation que les gens de la Haute, mais j’avais un minimum de bonnes manières. Même s’il m’arrivait de les oublier parfois.

- Non, je ne savais pas. Ca serait marrant en effet, mais David est loin de connaitre tous les flics de Mégalopolis.

Le silence se réinstalla pendant un instant et tandis que je mangeais, mon regard se baladait sur la décoration du bar-brasserie. Je le reposai sur Elijah quelques secondes, le temps de croiser son regard et de le voir baisser les yeux. Il avait l’air préoccupé tout à coup. Comme s’il venait de se rappeler de quelque chose et que ça le tracassait. Je ne pus m’empêcher de froncer les sourcils, cherchant ce qui avait pu déclencher cette réaction. Avais-je dis quelque chose qu’il ne fallait pas ?

Lorsqu’il manifesta sa satisfaction, je hochai la tête et lui adressai un sourire. Mais je l’interrogeai toujours du regard. Je ne dis rien, cependant, consciente qu’il n’avait peut-être pas envie d’en parler. Je respectai son silence. Qui étais-je après tout pour qu’il me dise ce qui le tracassait ? Rien de plus qu’une connaissance.

- Ne le dites pas trop fort, sinon Earl va prendre la grosse tête.

J’avais moi-même terminé mon plat et il ne me restait qu’une ou deux gorgées de soda dans mon verre. Je le vidai et me levai.

- Vous avez des projets pour ce soir ?

Quand elle lui fit la remarque sur Earl, il posa son doigt plusieurs fois sur ses lèvres, susurrant des ‘’ Chut, chut, chut ‘’ à chaque fois. Il rit et fini son propre verre avant de le poser un peut plus loin sur la table.
Quand elle lui demanda ses plans de la soirée, il tapota de nouveau son sac d’un air neutre. Il avait retrouvé son ton habituel, plus aucune trace de ses tracas. Il se massa légèrement l’épaule et répondit à la jeune femme.

- Déjà, reposer ça, il ne manquerait plus que je me fasse contrôler par les forces de l’ordre et qu’ils me trouvent avec ça ! Ensuite, une douche et après, rien de prévu, non. J’avais des projets, mais… c’est mieux si je ne retourne pas où je voulais me rendre de toute façon. Donc rien de prévu, je suis libre comme l’air.

Il fit un geste avec ses deux mains comme un oiseau qui s’envolait. A vrai dire, il avait prévu de passer la soirée avec un verre plein de glaçon et un fond de liquide ambré et de la musique. Mais si il avouait ça a la jeune femme, elle se moquerait surement, alors il préférait lui dire qu’il n’avait rien de prévu. Et puis… après tout, on ne sait jamais ce qu’on ferait dans une heure, n’est-ce pas ?
Il leva les yeux vers elle et se pinça la lèvre inferieur avec les dents.

- Pas de tatouage et pas de voiture, rassurez-moi…

Je haussai les épaules.

- Bah, vous avez le droit de vous balader avec des bombes de peinture. C’est pas interdit par la loi que je sache. Tant que vous ne vous en servez pas sous leur nez. Après… si vous avez de la chance, vous tomberez sur David et il vous laissera filer tranquille.

Je ramassai ma besace. Comme d’habitude, elle était trop pleine et je dus encore une fois en vider le contenu pour mettre la main sur mon portefeuille. Le pire, c’est que j’avais des tas de trucs inutiles la dedans mais je n’étais pas du genre à ranger correctement mes affaires. A vrai dire, pour une fille, j’étais très désordonnée.

Sa remarque me fit rire.

- Hum... Non non, rien de tout ça. Je vais retrouver les garçons et leur prouver que c’est pas parce que je suis une fille que je manie moins bien la moto qu’eux. On doit se retrouver sur un circuit pour une petite course. Et après, quand je leur aurais mis la pâtée… j’en sais rien, je planifie rarement mes soirées à l’avance.

Je réfléchis quelques instants. Il y avait bien cette chose qu’on faisait souvent avec mes parents et David avant que la maladie n’arrive.

- Mais ça fait longtemps que je suis pas allée voir un coucher de soleil sur la baie…

Mon regard s’assombrit tandis que je pensais à ça. Je n’aurais pas su dire pourquoi je n’y étais jamais retournée. Je ne prenais plus le temps de savourer les petits bonheurs de la vie, sûrement. Et puis je voyais rarement mes parents. Ils étaient très affectés par ma maladie, quel parent ne le serait pas. Je n’en pouvais plus de lire l’inquiétude dans leurs yeux. Alors évidemment, on allait les voir de temps en temps avec David, mais j’évitais de rester seule avec eux ou de partager des moments de complicité. Je sentais leur douleur. Je savais qu’ils souffraient à cause de moi, je ne pouvais rien y changer et ça me faisait terriblement mal. Au fond, j’agissais avec mes parents un peu comme David était avec moi. Ca devait être de famille.

Je me tournai vers Elijah et me forçais à sourire.

- Si le programme vous tente, vous êtes le bienvenu. En plus, j’aurais bien besoin d’un arbitre impartial. Si la victoire se joue à peu de choses et que je suis en tête, les garçons seront trop mauvais perdants pour accepter la réalité ! A moins bien sûr que vous ne souhaitiez vous mesurer à moi vous aussi !

Il sourit à Angela quand elle lui parla de son frère et de comment il le laisserait filer sans problème si il l’attrapait avec des bombes de peintures. Il secoua la tête et joua les offusqués.

- Je ne suis pas ce genre d’homme qui aime à faire jouer ses relations pour éviter ses ennuis. Vous me blessez Mademoiselle…

Quand elle lui proposa de venir avec eux pour une course de moto prévue depuis un moment, il fit la moue. Certes, la proposition était plus qu’alléchante et ça lui ferait du bien. Mais il y avait des choses qui le dérangeait légèrement.

- Je ne dirais pas non pour venir. Puis l’idée de servir d’arbitre me plairait bien, je dois l’avouer. Pour ce qui est de courir avec vous… j’aurais accepté si j’avais eu la moto, mais elle est au garage avec Bruce. Nous avons prévu de travailler sur deux, trois idées pas forcément légale pour rendre cette dernière plus… compétitive dirons-nous. C’est la moto de ce type, Damian qui m’a donné l’idée. Ce n’est pas un modèle qu’on voit tout les jours et elle faisait un bruit bien distinctif. Donc je me suis dis qu’il était temps de jouer l’inspiration et de modifier la mienne.

La sienne. C’était un bien grand mot. Disons que c’était un projet commun qu’il avait avec Bruce. Une sorte d’activité père/fils, bien que Bruce n’est rien de son père. Mais sa fille ayant refusé de participer à ce genre d’activité avec lui, Elijah s’était senti obligé de se proposer. Et au fond… il ne le regrettait pas. Bruce avait beau être un tire au flanc de première depuis qu’ils travaillaient ensemble, il n’en était pas moins une personne gentille dans le fond.

- Pour ce qui est de me mesurer à vous… je connais des motardes, certaines plus farouches que moi et de loin. Donc je n’ai pas besoin de preuve.

Il lui fit un clin d’oeil pour appuyer la fin de sa phrase.

La réaction d’Elijah me fit rire.

- Mais quelle relation ? Vous avez juste aperçu David pendant… allez on va dire 10 secondes. Je ne suis même pas sûre qu’il vous reconnaisse s’il vous croisait dans la rue ! A moins que vous ne me cachiez quelque chose ?

Je m’approchai de lui et plantai mes yeux dans les siens, comme si j’essayais de trouver quelque chose de suspect dans son regard. Puis je secouai la tête et reculai pour écouter ses explications à propos de sa moto. Une moto plus compétitive ? J’aurais bien aimé voir ça. Ma moto à moi n’était pas hyper puissante, mais je n’avais pas les moyens de la changer, pas maintenant. Alors, même si je rêvai d’en conduire une bien plus puissante un jour, je me contentais de la mienne pour l’instant.

Sa dernière remarque me fit sourire et je tendais les mains vers lui comme pour le remercier.

- La voilà. Ca c’est un truc que j’aime entendre. Vous devriez le redire devant les garçons parce qu’eux, ils ne veulent pas me croire quand je leur dis que sur circuit et à puissance égale, je les bats quand je veux. Et pas parce que je suis plus légère !

Je passai la sangle de ma besace par-dessus ma tête en enfonçai mes mains dans mes poches.

- Bon bah, écoutez, vous faites ce que vous voulez. En tous cas, nous, on s’est donné rendez-vous à 18h sur le circuit.

Je farfouillai dans mon sac, réussis à en extirper un crayon et bout de papier sur lequel je notai l’adresse du circuit, et le tendis à Elijah.

- On sera content si vous vous joignez à nous, mais on veut pas vous forcer hein !

Elijah prit le papier et regarda l’adresse que la jeune femme avait inscrit dessus. Il ne connaissait pas ce coin là. Mais après tout, ce n’était qu’un endroit parmi des centaines qu’il ne connaissait toujours pas dans sa nouvelle ville.
Il plia le papier et le rangea dans sa poche arrière avant d’acquiescer lentement.

- Je viendrais. Et dans le pire des cas, une fois lancé, vous ne pourrez pas me rattraper si je décide de fuir, n’est-ce pas ?

Il était mal à l’aise rien qu’à l’idée de se retrouver avec le groupe d’Angie. Lui qui était d’un naturel loup solitaire, ce genre de réunion, il ne savait pas vraiment composer avec, mais il ferait de son mieux, après tout, il avait bien réussi à venir pour son concert et il n’en était pas mort. Enfin… il avait peut-être frôlé cette dernière, mais il n’en était pas mort, ça, c’était une certitude.

Il lui fit un clin d’oeil et se redressa avant de faire signe du pouce vers Earl.

- Je vais régler et je vous laisse ranger votre sac ?

Il sourit à la jeune femme et s’éloigna de quelques pas a reculons sans la quitter des yeux. Il savait que ça ne passerait probablement pas, mais ça valait le coup d’essayer, n’est-ce pas ? On l’avait élevé dans ce sens là après tout.

Tandis qu’il empochait le papier, je continuais à farfouiller dans mon sac. Bon sang, il était passé où ce portefeuille. N’y tenant plus, je décidai d’utiliser la manière forte. J’attrapai ma besace par le fond et la retournait au dessus de la table pour la vider totalement. J’avais tout un tas de fourbi la dedans. Un sac de fille direz-vous. Sauf que moi, je ne me baladais pas avec des serviettes hygiéniques et du maquillage. J’avais des papiers, un tas de papiers : des partitions pour la plupart. J’avais aussi mon baladeur avec mon énorme casque qui me coupait totalement du monde lorsque j’écoutais de la musique.

Je relevai la tête vers Elijah, un peu intriguée parce qu’il venait de dire.

- Pourquoi vous voudriez vous enfuir, on n’est pas méchant vous savez, même si bon, on a des sacrées têtes de rebelles.

Je ne pus m’empêcher de me marrer. Des têtes de rebelles, nous ! Les garçons avaient plutôt des têtes de beaux gosses, même s’ils ne s’en rendaient pas compte et moi… moi j’avais l’air d’un garçon manqué. Ce que j’étais plus ou moins.

- Mais vous savez, si vous voulez vraiment vous enfuir, on ne cherchera pas forcément à vous retenir. On a juste envie de s’amuser, et on ne s’amuse pas si on est contraint d’être là.

Je reportai mon attention sur le contenu de mon sac, toujours à la recherche de mon portefeuille quand je mis la main sur…

- Oh mes clefs ! Je les ai cherchées partout ce matin !

Je les fourrais dans mon sac et continuai ma fouille. Et au moment où je mettais la main sur mon portefeuille, enfin, Elijah sortit sa remarque… Je relevai à nouveau les yeux sur les lui.

- Même pas en rêve ! On paie chacun sa part. Je suis pas une fille qui se fait entretenir moi. Je suis indépendante !

Et je lui adressai ce que j’appelai mon sourire de winneuse.

Quand elle retourna son sac, Elijah avait laissé échapper un sifflement de surprise. Comment pouvait-on mettre tant de choses dans un si petit conteneur quand on était pas une nany anglaise ? Il rit pour lui-même et la laissa fouiller dans son désordre pour chercher ce qu’elle voulait. La réaction quand aux clefs le fit sourire de plus belle.

Il s’y attendait, quand elle lui fit la remarque sur la femme qui se faisait entretenir, il haussa les épaules en levant les yeux au ciel. Le nombre de fois où il avait entendu ça, il ne les comptait plus. C’était la spécialité de sa soeur a vrai dire.

- Rien a voir avec le fait de se faire entretenir, mais soit, je ne discuterais pas le sujet. On m’a apprit à ne jamais me perdre dans un combat qui était perdu d’avance sauf avec une bonne stratégie, chose que je n’ai pas.

Il lui fit un clin d’oeil et tourna les talons une fois qu’elle eu terminé de ranger son sac pour se diriger vers Earl.
Il sortit un billet et le tendit au cowboy, ça couvrait sa commande et légèrement plus, mais ça… c’était les avantages de payer en premier. Dans le pire des cas, Earl garderait la monnaie, dans le meilleur, Angie se retrouverait avec légèrement moins à payer que prévu, il s’y retrouvait comme ça.

Il s’accouda au bar, le temps qu’elle règle sa part et une fois dehors, il leva les yeux vers le ciel pour regarder où en était la journée. Il changea la prise sur son sac à dos et posa de nouveau les yeux sur elle.

- Vous êtes garée sur le Parking de l’Hôpital ?

Je hochai la tête, signe qu’effectivement, c’était un sujet qu’il ne valait mieux pas discuter. J’avais mes arguments et quoiqu’il arrive, je n’en démordrai pas. Il était hors de question qu’un garçon me paye quoi que ce soit, à moins d’être mon petit ami. Et ça, bon courage à celui qui voudrait tenter de le devenir !

- On vous a bien élevé, c’est bien.

J’enfournai mes dernières possessions dans mon sac, sans aucune espèce de rangement. La prochaine fois que je chercherai quelque chose, il faudrait à nouveau que je vide tout. J’avais l’habitude, pas de problème. N’empêche, il faudrait quand même que je fasse un tri la dedans. Ne serait-ce que regrouper mes partoches dans une pochette, ça serait déjà ça. Mais je savais pertinemment que je ne le ferai pas.

Je suivis Elijah jusqu’au bar pour régler ma note moi aussi. Je savais combien je devais payer, au centime près. Aussi quand Earl m’annonça un montant moins que ce à quoi je m’attendais, je roulai des yeux avant de les reposer sur Elijah.

- Tricheur !

Je payais quand même la totalité de mon repas à Earl, arguant que le trop perçu était pour le pourboire. Ainsi, pour moi aussi, l’honneur était sauf.

Je passai la sangle de ma besace par-dessus ma tête et me dirigeai vers la sortie.

- Non, je suis venue en bus. Je n’ai pas réussi à remettre la main sur mes clefs ce matin. Je n’arrivais pas à me rappeler ce que j’en avais fait. Si j’avais su qu’elles étaient tout simplement dans mon sac…

Je passai la porte la première et la tint ouvert pour Elijah. Moi aussi je connais la galanterie !

- Bon et bien... On se retrouve la bas alors ?

Il ne releva pas la remarque sur son éducation. C’était un sujet pointilleux. Sa jeunesse, de son point de vue c’étant arrêté vraiment trop tôt, il aimait à penser qu’il avait été bien élevé, que ce soit par ses parents ou sa soeur ensuite, mais il doutait que le reste de son éducation se soit passé si bien que ça. Mais c’était toujours agréable à entendre, alors il sourit à Angela et garda un air neutre.

Par contre, quand elle le traita de tricheur, il éclata de rire. Comme il s’en doutait, elle l’avait vu venir, mais l’avait bien prit. Il leva les mains vers le ciel comme pour dire qu’il avait été attrapé, mais qu’il avait essayé au moins. Il savait que de toute façon, Earl aurait été content du pourboire, alors tout le monde aura été gagnant.

Quand elle lui répondit qu’elle était venue en bus a cause de ses clefs, il secoua la tête et lui prit le bras doucement pour la tirer à sa suite juste assez longtemps pour qu’elle comprenne le message avant de la lâcher et se dirigea vers sa place, la voiture n’était pas loin a vrai dire, elle était dans le parking de l’hôpital tout simplement.

- Je coute moins cher qu’un Bus et puis ce n’est pas bien loin, on serra là-bas rapidement.

Il lui lança un regard par dessus son épaule.

- Puis vous ne voudriez pas être en retard à la course a cause d’une ligne de bus perturbée, pas vrai ?

Quand Elijah me prit par le bras et commença à m’entrainer à sa suite, je n’eux pas d’autre choix, dans un premier temps, que de le suivre. Même s’il ne tirait pas fort, il tirait quand même. J’avais compris le message bien sûr. Et certes, l’idée de voyager avec lui plutôt qu’en bus était plutôt plaisante. Mais il y avait quand même un petit truc qui m’empêchait d’accepter tout de suite.

- C’est gentil mais… Je dois repasser chez moi pour récupérer ma moto. J’en ai besoin pour la course !

Je vous vois venir, vous allez me demander pourquoi je n’étais pas venue avec à l’hôpital plutôt qu’en bus. En fait, je n’avais pas pu. Au moment de partir bosser ce matin, David n’avait pas réussi à démarrer sa voiture : batterie à plat. Et comme moi je n’arrivais pas à remettre la main sur mes clefs, il n’avait pas pu se servir de ma voiture pour démarrer la sienne. Du coup, il était parti avec ma moto. Parce que là, par contre, les clefs étaient bien à leur place dans le plat de l’entrée. Et c’est comme ça que moi, je m’étais retrouvée à prendre le bus. Juste à cause d’un trousseau de clefs dont j’avais oublié la localisation.

- Et puis, vous ne vouliez pas repasser chez vous ? Vous reposer ou…

Je fouillai dans ma mémoire à la recherche de détails qu’il m’avait donnés tout à l’heure.

- Vous aviez parlé d’une douche il me semble.

J’avais conscience que pour le coup, j’avais l’air de chercher toutes les excuses possibles et imaginables pour ne pas monter dans sa voiture. Ce qui n’était absolument pas le cas. Je ne voulais pas le déranger, c’est tout. Le pauvre, il me tombait dessus à l’hôpital et voilà qu’il se trouvait embarqué pour une soirée qu’il n’avait pas prévue. Je n’allais tout de même pas en plus lui demander de me servir de chauffeur ! Sans compter que je connaissais déjà la réaction qu’aurait David s’il me voyait encore rentrer avec Elijah. Et pour être honnête, je n’avais pas spécialement envie de répondre aux questions d’un frère qui se faisait une idée totalement fausse de la réalité.

- Enfin, c’est juste qu’il ne faut pas vous sentir obligé de me raccompagner à chaque fois qu’on se voit !

Eli regarda de nouveau par dessus son épaule et lui lança un regard amusé. Au début, il l’avait vraiment prit comme si elle ne voulait pas qu’il la ramène en effet. Et ensuite, il avait pensé à sa réaction au restaurant et il secoua lentement la tête, les yeux pétillants. Il soupira et traça une ligne imaginaire sur leur gauche.

- Je vais faire tout ça, j’ai encore beaucoup de temps avant l’heure du rendez-vous et c’est sur mon chemin de toute façon. Je dois repasser par votre quartier pour regagner la rue qui me redescendra vers mon quartier. Donc je ne vois aucune raison de ne pas vous ramener alors que c’est sur mon chemin.

Il fixa droit devant lui et fit quelques pas avant de reprendre sans la regarder cette fois-ci.

- A moins que vous ne vouliez pas que je vous reconduise, auquel cas, vous devriez juste me le dire et je rentrerais directement chez moi en vous laissant attendre votre bus.

Il indiqua un point plus loin devant eux. On pouvait voir le parking de l’Hôpital et il n’était pas difficile de localiser la voiture non finie du jeune homme au loins.

- Je dirais à vu de nez que vous avez quelque chose comme trois minutes pour vous décider… une fois là-bas, je devrais être forcé de vous ouvrir la porte et là… vous serrez bien bloquée, n’est-ce pas ?

Cette fois par contre, il tourna de nouveau la tête pour la regarder par dessus son épaule, franchement amusé.

Quand Elijah se retourna pour me regarder, je captai son regard amusé. Et ça me rassura. J’avais peur qu’il prenne mal mes excuses pour ne pas monter avec lui mais apparemment, ce n’était pas le cas. Et quand il se mit à parler, je dus me rendre à l’évidence que cette fois, je n’avais plus aucune excuse. Je m’apprêtai à céder à ses arguments lorsqu’il reprit la parole.

- Oh mais non, c’est pas du tout ça ! Arrêtez. C’est bien plus sympa de rentrer avec vous plutôt que de prendre le bus.

Je haussai les épaules avant de continuer.

- C’est juste que… je modifie déjà vos plans pour la soirée alors… Je ne voulais pas abuser.

Elijah m’indiqua d’un geste de la main sa voiture garée sur le parking et m’annonça le temps qu’il me restait pour me décider. A la fin de sa phrase, il me lança un nouveau regard amusé et je ne pus m’empêcher de lui sourire. J’avais l’impression que, sans en avoir l’air, il m’avait amenée à changer d’avis. Enfin, il avait juste eu les bons arguments pour me convaincre même si, bon, je n’étais pas non plus totalement opposée à l’idée de rentrer avec lui.

- Bon, puisque c’est sur votre route, j’aurais tort de ne pas en profiter.

Je me remis en marche et le rattrapai.

- Bon, maintenant, je peux vous le dire. Je préfère cent fois rentrer avec vous. Même si dans le bus on fait parfois des rencontres sympas, y’a aussi, souvent, des mecs bizarres qui vous regardent d’un air louche. Avec vous, au moins, y’a pas de soucis !

Je lui adressai un clin d’œil et me mis à rire.

Ils venaient d’arriver devant la voiture. Comme à son habitude, Elijah ouvrit la portière de la jeune femme avant de faire le tour, s’arrêtant au niveau du coffre pour y déposer son sac à dos et rentrer par la portière conducteur. Une fois au volant, il lui fit un clin d’oeil.

- Mes plans ne sont pas modifiés, ils sont améliorés. Vous croyez réellement que je préfère rester chez moi et ne rien faire plutôt que sortir ? Je veux bien être une personne solitaire, mais se forcer à sortir à TOUJOURS du bon.

Il fronça les sourcils et la dévisagea de la tête aux pieds.

- Pourquoi, vous ne me croyez pas capable de regarder les gens d’un air louche ?

Il mit le contact et fit ronronner la voiture une minute avant de prendre le chemin du retour. Il commençait à connaitre la ville médiane. Peut-être pas autant que la ville basse, mais ça rentrait petit à petit.
Il n’avait plus besoin de GPS en tout cas pour retrouver son chemin sur la route vers chez Angie.

- Je n’arriverais surement pas en avance me connaissant. Mais je tenterais d’être là à l’heure en tout cas.

Comme d’habitude, Elijah s’empressa de m’ouvrir la portière de la voiture. Une fille normale aurait sûrement été ravie de tant d’empressement mais allez savoir pourquoi, pas moi. Enfin, c’est pas que ça me déplaisait mais… je trouvais ça marrant plus qu’autre chose. Je n’étais pas habituée à ça. Ni David ni les garçons n’avaient jamais été comme ça avec moi. Est-ce que ça venait de leur façon de me voir ? Pour David, j’étais juste sa petite sœur. Quand au garçon… je crois qu’au fond, même s’ils savaient que j’étais une fille, ils m’avaient toujours vue comme un garçon. Faut dire que je les aidais dans ce sens. Quand aux autres garçons que j’avais croisés, ils ne se montraient pas aussi prévenant. Enfin bref, tout ça pour dire que la galanterie d’Elijah me  faisait sourire. Mais bon, quand, pour une fois, on vous traite comme une princesse, on va pas cracher dessus hein ?

- Améliorés ? Vraiment ? Attendez la fin de la soirée avant de dire ça. Vous ne savez même pas si ça va être une bonne soirée. Enfin je veux dire, pour moi ça sera une excellente soirée, je sais à quoi m’attendre. Mais vous… Qu’est-ce qui vous fait croire que vous vous amuserez forcément ?

Sa question me laissa perplexe. D’autant plus qu’il était resté plutôt neutre. Pas de sourire pour contredire ses paroles. Je décidai de prendre ça à la blague. Je ne connaissais pas encore beaucoup Elijah, mais je commençais à le cerner un peu. Et puis, mon intuition me disait que ce n’était pas son genre et mon intuition ne me trompait jamais.

- Oh, je n’ai pas dit que vous ne le faites jamais. Mais moi en tous cas, vous ne m’avez jamais regardée avec un air louche. Ca me suffit.

Je lui adressai un clin d’œil et reprit mon sérieux.

- Mais je ne pense pas que ça soit votre genre. Vous voulez que je vous dise ? Je me trompe peut-être, mais je pense que vous êtes quelqu’un de bien. Ou en tous cas, quelqu’un avec  qui une fille n’aurait rien à craindre. Et croyez moi, de nos jours, c’est rassurant de rencontrer quelqu’un comme vous.

Je haussai les épaules et repris mon ton un peu blagueur.

- Mais bon, il est vrai que je ne vous connais pas assez pour en être certaine. Je me trompe peut-être.

Eh oui, moi et ma manie de charrier les gens en toute occasion…

Elijah joua avec ses doigts sur le volant, les levant et les renaissant au rythme d’une musique qu’il avait en tête. La musique, tiens, c’est ça qu’il manquait.
Il fit glisser sa main légèrement sur la droite et activa cette dernière, le volume étant de base assez bas pour ne pas déranger la conversation, mais assez fort pour pouvoir profiter du fond sonore.

- Je n’ai jamais eu de raison de le faire, voila tout.

Cette fois-ci, cependant, il lui fit un clin d’oeil avant de prendre un virage sur la droite qui allait remonter le long d’une avenue qui finirait par mener à une perpendiculaire à la rue de son quartier. Il aimait à observer ce coin de la ville, tout se mêlait, les voitures de la ville haute qui passaient par là pour X raisons et les voitures de la ville basse qui montaient ou descendaient travailler.

- J’ai dis améliorés dans le sens où bonne ou pas, ça ne sera jamais pire que passer la soirée tout seul. Même si ça fini en fusillade et explosions sur fond de moteur, ce que j’espère secrètement, la soirée sera toujours réussite dans un sens.

Il soupira un grand coup et ouvrit légèrement la fenêtre pour qu’un filet d’air froid puisse s’infiltrer dans l’habitacle.

- C’est une question de point de vue je suppose.

Je levai un doigt vers le ciel, ou plus précisément vers le toit de sa voiture.

- Objection votre honneur. Il y a parfois des soirées qu’on ferait mieux de passer tout seul ! J’ai plusieurs exemples en tête mais je préfère les garder pour moi. Peut-être plus tard dans la soirée, si j’ai assez bu pour ça.

Je baissai mon doigt et penchai la tête vers le côté.

- Mais je reconnais qu’à plusieurs, c’est quand même plus marrant. Y’a pas besoin d’être nombreux, il suffit juste d’être deux, à condition que ça soit avec une personne qu’on apprécie. Parce que si c’est votre pire ennemi, ce n’est même pas la peine !

On se rapprochait de plus en plus de la maison et on finit par arriver.

- Bon et bien, merci pour le trajet ! Et à plus tard. Y’a pas de soucis si vous n’êtes pas à l’heure, on vous sautera pas à la gorge. On fera quelques petits tours d’essai, pour s’échauffer, en vous attendant.

Je lui adressai un sourire et sortis de la voiture. Je fis quelques pas en direction de la maison, me retournai juste le temps de lui adresser un salut de la main et entrai chez moi.

Arrivée là, j’avais quarante-cinq minutes pour éviter les questions idiotes de David qui s’avançait justement vers moi, prendre une douche et me préparer pour ma sortie moto. En soit, les deuxième et troisième parties n’étaient pas les plus longues mais la première allait dépendre de ce que David allait me sortir. Et, aussi étonnant que cela puisse paraitre, il se contenta de me sourire, sans me poser la moindre question hormis les interrogations habituelles style « bonne journée ? » ou « t’as quelque chose de prévu ce soir ? ». Pauvre David, maintenant que je n’avais plus mon traitement, il avait recommencé à travailler les mardis et mercredi et du coup, on ne passait presque plus de temps ensemble. Ca semblait lui manquer. Et ça me manquait à moi aussi, un peu.

Je filai sous la douche et enfilai mon pantalon de moto (un pantalon en cuir qui m’avait coûté une blinde et qui était un peu trop moulant à mon goût mais au moins, il était résistant en cas de chute) et un simple t-shirt sans manche. Ajoutez à cela ma paire de bottes  (de moto, tant qu’à faire), mon blouson et mon casque (un très beau casque intégral, noir avec un aigle aux ailes déployées peint de chaque côté) et j’étais prête à partir.

Je sortis la moto du garage et démarrai en trombe pour rejoindre le circuit. Les garçons étaient déjà arrivés. Mais pas Elijah. J’arrêtai ma moto, en descendis et retirai mon casque pour aller les saluer.

Le retour avait été fait aussi rapidement que possible. Il avait déboulé dans la ville basse à toute vitesse et était arrivé chez lui quelques minutes plus tard.
Être de retour dans son nid après une journée comme ça était toujours agréable. Mais pour une fois, il savait pertinemment qu’il ne pourrait pas simplement s’allonger sur son canapé et regarder le vague pour se détendre. Il avait des choses à faire.

Il rangea son sac dans un placard et se dirigea dans la salle de bain. il devrait changer le pansement de toute façon, alors il prit sa douche avec précaution et changea le bandage après coup.
Au moment de sortir de chez lui, il avait enfilé un jean noir avec plus de poches que de surface et un débardeur blanc. Il avait mémorisé l’adresse qu’Angie lui avait donné, alors le chemin jusqu’a la piste ne fut pas vraiment compliquer. L’endroit était visiblement de loin a vrai dire.

Il gara la voiture non loin de l’entrée et se dirigea vers cette dernière. Il n’avait aucune idée de ce qu’il allait trouver derrière. Après tout, il n’avait vu les amis d’Angela que de loin, mais ils ne pouvaient pas manger les gens, pas vrai ?

Il vit la jeune femme et le groupe sitôt dans le batiment et décida de rester à l’écart. Visiblement Angela n’était pas là depuis longtemps vu qu’ils en étaient encore à se dire bonjour. Autant attendre que ça passe.
Il se posa contre un mur et attendit sagement.

Les garçons et moi étions en train de discuter quand Elijah est arrivé. Comme j’étais dos à la porte, je ne le vis pas entrer tout de suite. Je venais de leur apprendre que j’avais invité quelqu’un pour arbitrer la course. Les garçons prirent très bien la nouvelle, à part Matt. Mauvais joueur, il était sûr que puisque l’arbitre était mon ami, il ne serait pas totalement impartial.

- Alors d’abord, j’aurai tellement d’avance sur toi que le doute ne sera même pas possible. Et ensuite, c’est pas vraiment un ami, plutôt une connaissance.

J’avais dis cette dernière phrase sur le ton de celle qui veut encore croire à ce qu’elle dit mais qui sait très bien que ce n’est pas tout à fait exact. Matt était sur le point de répliquer lorsque Tom me prit par l’épaule et me fit pivoter pour que je me retrouve face à la porte d’entrée. C’est là que je vis Elijah, adossé au mur.

Je m’avançai vers lui en souriant les garçons derrière moi.

- Pile à l’heure finalement ! Je vous présente Tom, Jimmy, Sam, Matt et Simon.

Ce faisant, j’indiquai les garçons un à un. Tous firent un geste de la main en entendant leur prénom, à la fois pour se signaler et pour saluer Elijah. Et tous avaient le sourire, y compris Matt et je compris une fois de plus que sa remarque de tout à l’heure n’était que de la provoc’. J’avais une relation bien particulière avec chacun d’eux et avec Matt, on était quasiment tout le temps en train de se chercher mais au fond, on ne pensait jamais vraiment les vacheries qu’on se lançait.

C’est Tom qui prit la parole en premier.

- Hey, c’est pas vous qui étiez au concert l’autre jour et qui avez kidnappé notre Angie ?

Il se rapprocha d’Elijah et lui parla sur le ton de la confidence.

- Comment vous avez fait pour la supporter ? Nous, on a beau la connaitre depuis des années, y’a des fois, on n’y arrive plus !

Les autres se mirent à rire tandis que je les fusillai du regard.

- Hey ! je suis un ange ! Bande de rustres !

Je leur tournai le dos et croisai les bras, l’air vexée. Ce qui fit rire Tom.

- Non je plaisante. Bienvenue parmi nous en tous cas.

Les autres garçons hochèrent la tête pour appuyer les dernières paroles de Tom et nous commençâmes à retourner vers nos motos.

Je me rapprochai d'Elijah tout en marchant.

- C'est vraiment sympa d'être venu. Je sais que c'est pas toujours facile de s'intégrer dans un groupe qui n'a pas bougé depuis de longues années. J'aurais compris si vous aviez préféré rester chez vous finalement. En tous cas, Tom vous a déjà adopté il semblerait !


[En cas de besoin, y'a des infos sur les gars ici 2ème post]

Il redoutait ce moment là comme un sparadrap qu’on retire sur le genou d’un garçon après une chute. Il vit tout le monde arriver et se força a sourire, son coeur s’emballant légèrement. Il avait beaucoup d’empathie et ça lui jouait énormément de tours en général, alors il se concentra sur le visage d’Angie quand elle présenta tout le monde. Il rendit le salut et sourit à l’assemblée.

- Je ne retiendrais pas les noms, je me connais, mais ça finira par rentrée avant la fin de la soirée…

Quand… Tom ? prit la parole, Elijah sourit et secoua la tête et les mains dans tout les sens.

- Remettons les choses en place… je n’ai enlevé personne. JE me suis fais enlevé.

Il lança un regard complice à Angelia après avoir dit ça. C’était elle en général qui envoyait ce genre de réplique, il lui avait piqué ses lignes de texte. Le positif suivit le groupe quand ils firent demi-tour et il écouta Angie qui le remerciait d’être venu en quelque sorte. Il n’allait tout de même pas lui dire ce qu’il ressentait présentement, alors il se contenta de hausser les épaules avec un air blasé.

- J’ai dis que je viendrais. En général, j’essaie de coller un maximum à ce que j’annonce. Puis comme je l’ai déjà dis, c’est un meilleur programme que celui que j’avais, alors je suis gagnant sur toute la ligne moi…

Plus ils approchaient, plus il regardait les motos d’un oeil expert, mais sans commenté pour autant.

La réplique d’Elijah fit rire Tom qui continua à marcher tout en lançant un :

- Bizarrement, ça ne m’étonne pas. C’est le genre de choses dont Angie est capable. Elle aime improviser des trucs et embarque souvent les gens derrière elle. Elle est parfois fatigante à force, mais faut reconnaitre qu’en général, on ne s’ennuie pas.

Il hocha la tête en direction d’Elijah et rattrapa son frère qui venait de l’appeler, nous laissant seul tous les deux.

Je répondis à la dernière remarque d’Elijah par un sourire et m’avançai vers ma propre moto. Le moins qu’on puisse dire c’est qu’aucun de nous six n’avait la moto la plus puissante de la planète. Mais on n’était généralement plutôt fier de motos. Et Tom avait un dicton : « c’est pas la puissance de la moto qui compte, c’est la façon dont tu conduis ». Et on était d’accord avec ça.

Moi, j’avais une kawasaki. Un modèle qui datait du début du siècle. Je l’avais eue pour pas chère et j’avais demandé à mon garagiste de me la retaper. Aujourd’hui, elle était comme neuve. Elle n’était pas super puissante, mais elle était légère et maniable et rapide surtout. Et elle me plaisait, c’était le principal.

Je jetai un coup d’œil vers Elijah. Je le voyais regarder nos motos une à une avec un regard de connaisseur. J’allais lui demander ce qu’il en pensait quand Matt prit la parole avant moi.

- Bon c’est pas le tout, mais j’ai rendez-vous avec Sonia dans une heure.
- Et nous on a l’anniversaire de mariage de nos parents, ajouta Sam tandis que Tom, son frère, hochait la tête. Alors si on pouvait ne pas trainer.

Nous enfourchâmes nos motos et les garçons les démarrèrent pour rejoindre la ligne de départ. Moi, je pris un moment pour parler à Elijah.

- Vous nous donnez le signal de départ ? Et je compte sur vous pour être impartial en cas d’arrivée serrée ! En cas de doute, moi j’ai le casque avec les deux aigles. Il est facile à repérer au milieu des autres !

Et pour cause, les garçons avaient tous les cinq des casques on ne peut plus classiques : noirs avec seulement le logo de la marque en gros. Quelle originalité ! En plus, ils avaient tous plus ou moins la même carrure. Le meilleur moyen de les différencier restait encore leurs motos. Et étant donné qu’Elijah s’y connaissait, cela ne devrait pas lui poser de problèmes.

J’adressai un nouveau sourire à Elijah, enfilai mon casque et rejoignis la ligne de départ avec les autres. En attendant le signal, les garçons s’amusaient à faire rugir leur moteur, comme pour se défier. Pas moi, j’avais le regard fixé sur la piste, concentrée pour ne pas louper le départ. Quand on a la moto la moins puissante du groupe, on n’a pas intérêt à se laisser surprendre.

La dernière remarque fit sourire Elijah qui avait perdu de sa verbe habituelle. Il n’était pas encore assez a l’aise avec le groupe pour être lui-même. Il était sur la retenue.
Quand ils furent tous sur leurs engins, il s’avança contre la rambarde. Il était hors de question qu’il joue les pimp à lancer la course au milieu de la route. Il se contenta donc de crier un bon coup pour que tout le monde puisse l’entendre.

- On m’a promis beaucoup de chose sur cette course ! Alors j’espère voir du beau jeu !

Il sourit franchement et leva une main en l’air en attendant que tout le monde se tienne prêt. Il resta comme ça une seconde avant de se remettre à parler.

- Prêt ?

Il baissa la main d’un coup, le geste étant suivi d’un ‘’ Partez !!! ‘’ assez sonore pour qu’on ne puisse pas prétendre qu’il n’avait pas été assez audible.
Il était d’un naturel observateur après tout, pour le coup, il était dans son élément et il espérait bien que ça allait lui plaire quand il vit les motos s’élancer.

Quand Elijah se mit en place, je lui décochai un clin d’œil et rabattis ma visière sur mes yeux. A son top, j’accélérai au maximum pour un départ en trombe. Mais ma moto était moins nerveuse que celle des garçons. Ils prirent tout de suite de l’avance sur moi. Mais je n’avais pas dit mon dernier mot. Je connaissais leur façon de conduire. Je savais qu’ils ralentiraient plus que moi pour prendre les virages. Je pourrais les rattraper et les doubler à ce moment là. Je comptais bien compenser mon manque de puissance par mon audace !

Il me fallut attendre la fin du premier tour pour rattraper Simon. Ils étaient finalement plus hardis dans les virages que je ne l’aurai pensé. Tom était en tête, suivi de près par Matt. Ils avaient quelques mètres d’avance. Moi, je gagnais du terrain, petit à petit et j’arrivai enfin dans la roue de Simon, profitant d’un ralentissement pour prendre le virage qui s’annonçait.

C’est à ce moment là que tout arriva. Alors que je me lançai à fond dans la ligne droite pour doubler Simon, quelque chose capta mon regard. Il y avait un enfant au bord de la piste. Eberluée, je tournai la tête pour le regarder jusqu’à ce qu’il sorte de mon champs de vision. Je n’eus pas le temps de me demander ce qu’il faisait là. Quand je posai à nouveau les yeux droits devant moi, l’enfant était là, en plein milieu de la chaussée, à la sortie du prochain virage. Pile devant moi. Surprise, je serrai les freins au maximum mais il était trop tard. Le contact avec l’enfant me fit perdre l’équilibre.

Je tombai sur le côté et ma moto glissa sur le flanc pendant quelques mètres. Moi, je me retrouvai sur le dos et mon casque heurta le sol dans un bruit sourd. J’avais de la chance. Je sortais tout juste d’un virage et je n’avais pas encore repris ma vitesse pour que la chute soit très grave. Cependant, ma tête heurta le sol assez fort pour me sonner pendant quelques secondes. Heureusement que j’avais mon casque !

Je repris conscience avant que les garçons ou Elijah ne soient arrivés près de moi mais je ne me relevai pas tout de suite. Pendant quelques instants, je regardai autour de moi, un peu perdue. Je n’arrivais pas à relever la tête, j’avais le souffle coupé et un peu mal à la nuque mais je pouvais bouger la tête. Et puis, dans un flash je revis l’accident et tournai la tête vers le côté.

- Le petit garçon !

Il aurait dû être là, étendu sur le sol comme moi. Je n’avais pas réussi à l’éviter. Il était beaucoup trop près pour ça. Je l’avais renversé avant de tomber, j’en étais certaine. Pourtant, il n’y avait aucun enfant sur le circuit. Il n’y avait d’ailleurs personne d’autre que nous.

Elijah aimait ça. La course. Même si il ne participait pas, il adorait voir ces bolides partir à une vitesse folle. Il pouvait regarder et écouter pendant des heures, il en était certain. Il notait chaque mouvement des compétiteurs, chaque courbes, voyait les idées derrières les prises de décision, c’était vraiment un de ses terrains. Il sentait d’ailleurs qu’Angela aimait la prise de risque, elle remontait petit à petit, profitant des virages pour gagner en vitesse et quelques précieux mètres. Mais il nota également les réactions étrange qu’elle avait. A deux reprises il s’était demandé ce qu’elle regardait quand elle avait tourné la tête jusqu’à ce que sa moto s’emballe et se couche.

Ils n’étaient pas très loin d’Eli quand ça arriva. Une trentaine de mètres a tout casser. Il sauta par dessus la rembarre de sécurité et fonça sur la piste dans la direction de la jeune femme. Il n’arriva pas a noter où étaient les autres dans un premier temps. Il était focalisé sur la jeune femme et la moto. La moto… il connaissait le comportement de ces véhicules dans ce genre de situation.
Il se concentra et laissa s’étendre son pouvoir assez loin pour capter si bien le metal que portait Angela que celui de la moto.
Il fit un geste de la main vers cette dernière pour l’éloigner encore plus d’Angie. Il y avait peut de risque qu’elle n’explose ou quoi que ce soit, mais il avait décidé il y a un moment qu’il assumait ses dons et ne les cacheraient pas.

Butterfly Effect a écrit:

Le membre 'Elijah Monroe' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

'SHUFFLE' : 6

La moto fremit et se déplaça en glissant latéralement sur le sol de plusieurs mètres avant de s’arrêter. Cela laissa le temps à Elijah de rejoindre Angie pour s’agenouiller à coté d’elle.

Il l’entendit parler d’un garçon à ce moment là. Il lança un regard autour de lui, mais ne voyant rien. Posa une main à plat sur le casque de la jeune femme, les sourcils froncé.

- il n’y a personne Angie. Ne bougez pas la tête, restez calme…

Il prit une longue inspiration pour retrouver son calme lui-même et se força a sourire.

- Comment vous vous sentez ? Je veux dire… mis a part que vous êtes tombé, ça je le sais…

Il lui lança un regard qui passait du sommet de son casque jusqu’à ses bottes de moto, lui faisant comprendre qu’il cherchait à savoir si elle n’avait rien de cassé.

Le membre 'Elijah Monroe' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

'SHUFFLE' : 6

Elijah fut le premier à arriver près de moi. Les garçons, complètement à leur course, ne se rendirent pas compte tout de suite que je ne suivais plus. Ce ne fut que quelques instants plus tard, que Tom s’en aperçut. Tournant la tête, il vit ma moto, couchée sur le flanc, à l’autre bout de la piste. D’un geste de la main, il invita les autres à ralentir et à le suivre jusqu’à l’endroit où j’étais couchée.

Moi, pendant ce temps là, je continuai à chercher le petit garçon du regard mais je ne le voyais nulle part. La voix d’Elijah traversa mon casque et, tandis que je tournai à nouveau la tête pour poser les yeux sur lui, je sentis une légère pression sur mon casque, m’intimant à rester immobile. Mais sa remarque ne m’aidait pas du tout à rester calme.

- Le petit garçon… Vous l’avez vu hein ? Dites moi que vous l’avez vu ?

Je plantai mon regard dans celui d’Elijah, y cherchant une confirmation, la preuve que je n’étais pas folle. Il ne pouvait voir que mes yeux au travers de la visière, mais j’étais terrorisée et ça se voyait à mon regard. Je commençais à comprendre que ce petit garçon n’était qu’un nouveau tour que venait de me jouer mon cerveau. Les médecins m’avaient prévenue que ça arriverait, un jour, les hallucinations. Et je ne savais pas si je devais être soulagée que l’enfant n’ait pas existé ou bien inquiète de l’avoir vu.

Instinctivement, je m’accrochai au regard d’Elijah comme à une bouée de sauvetage.

- Je crois que ça va… J’ai mal à la nuque mais ça va. Vous pouvez m’aider à me relever ?

Vu son agitation, Elijah en conclu qu’elle ne devait pas avoir subit trop de dégât en tombant de sa moto. Sa tenue avait dû faire l’affaire. Il soupira d’apaisement et lança un coup d’oeil alentours quand il entendit les autres moto s’approcher. Visiblement, ses amis avaient enfin fini par comprendre qu’il manquait une personne à l’appel et ils convergeaient dans leur direction. Il en fut légèrement rassuré, il ne sut se l’expliquer.

Quand elle demanda de nouveau pour l’enfant, Elijah fronça les sourcils. Il regarda de nouveau autour de lui, mais comme la première fois, il ne vit rien. Rien que la trace du dérapage, pas d’enfant à l’Horizon, il n’en avait d’ailleurs jamais vu aucun.

- Il n’y avait aucun enfant Angela. Ne vous inquiétez pas, vous n’avez blessé personne.

Il avait travaillé sa réponse à la vitesse de l’éclair. Il allait répondre qu’il n’y avait jamais eu d’enfant, mais ces mots là auraient eu beaucoup trop d’impact, il en fut conscient en croisant le regard sous la visière de la jeune femme. Il avait donc opté pour la neutralité et il n’en était pas peu content.

Quand elle lui demanda de l’aider à se redresser, il fit la moue. Il était très bien placé pour savoir que ce genre d’accident laissait de mauvaises traces et pas des plus visibles, rarement des plus visibles d’ailleurs.
Mais il savait que si il refusait, elle le ferait d’elle même. Du moins, il s’en doutait, alors sans quitter les yeux qu’il apercevait sous la visière, il se redressa légèrement, il ne s’était pas rendu compte qu’il s’était à moitié couché sur le bitume quand il était arrivé à coté d’elle. Il se mit donc a genoux et lui tendit la main pour l’aider.

- On ne se lève pas trop vite… doucement. Il ne manquerait plus qu’on agrave les choses pas vrai ?

La réponse d’Elijah finit de me convaincre que je n’avais finalement fait qu’imaginer l’enfant. Je soufflai, rassurée. Je préférais encore avoir des hallucinations plutôt que d’avoir blessé quelqu’un.

J’attrapai la main qu’il me tendait et me relevai, doucement, comme il le conseillait.

- Merci

Une fois debout, je dus me rendre à l’évidence. Je tenais sur mes jambes et ne ressentais qu’une légère douleur à la cheville gauche. Une chose était sûre en tous cas, demain, je serais sûrement incapable de bouger à cause des courbatures, mais pour l’heure, ça allait.

Les garçons arrivèrent au moment où je levai les mains pour retirer mon casque. Sam, Matt et Simon restèrent en arrière, un peu impressionnés, tandis que Tom et Jimmy s’approchaient de nous. Leur arrivée interrompit mon geste.

- Angie, est-ce que ça va ?

Je hochai la tête et essayai à nouveau de retirer mon casque. Sans succès, soit je n’avais pas encore récupérer toutes mes forces, soit il s’était déformé dans la chute.

- Est-ce que l’un de vous peut m’aider ?
- Je ne sais pas si c’est très prudent Angie. Tu pourrais avoir un traumatisme crânien… commença Jimmy.

Je soupirai, mis à part la douleur dans la nuque, rien à signaler.

- Je me sens bien Jimmy, c’est bon.

Mais ce n’était pas suffisant pour Jimmy. Il était en dernière année de médecine. Il savait de quoi il parlait.

- Ok alors dis moi quel jour on est aujourd’hui.

Je soupirai avant de répondre à sa question.

- Mardi… Et je m’appelle Angie Foster et je suis née le 23 avril 2046. Ca te va ? Rassuré ? Je peux enlever mon casque maintenant.

Les garçons échangèrent un regard et Jimmy se mit à secouer la tête.

- Non, ça c’est la date de naissance de ton frère…

Il aurait mieux fait de se taire pour le coup.

- Merde Jimmy, je te dis que ça va ! Ca veut rien dire ça, je mélange toujours les dates, demande aux autres ! Alors aidez-moi à enlever ce putain de casque ! Elijah ? S’il vous plait !

Je me tournai vers Elijah pour le supplier de m’aider tandis que Matt se mettait à rire de ma réaction.

- Ah bah là, c’est clair, notre Angie est en pleine forme !

Mais Tom était encore inquiet.

- Angie, qu’est-ce qui s’est passé ?
- J’ai glissé…

Sam et Simon échangèrent un regard dubitatif, ils avaient remarqué les traces de pneus sur le sol. Tom les surprit et se tourna vers Elijah.

- Vous avez vu ce qui s’est passé ?

Je plantai mon regard dans celui du positif, le suppliant en silence de valider ma version des faits. Je ne voulais pas que les garçons s’inquiètent.