MEGALOPOLIS,
Septembre 2079

Il n'y avait pas plus bel endroit dans cette cité décharnée que le coucher du soleil sur les ruines de la Ville Basse, à la frontière entre le Queens... Et l'Océan Atlantique. Les rayons frôlaient les pierres abîmées et lissées par le flot des vagues depuis des années, maintenant. Ce qu'il restait de New-York n'était plus qu'une étendue de sable au nord ouest, une île aux rues mal fréquentées rattachée au continent par des ponts bancals, et ces vieux immeubles squattés par une population désœuvrée, que le monde a abandonné à son sort. Souvent jeunes et mal embouchés, les membres de l'Enclave étaient avant tout pour la grande majorité des Positifs, ou des Candidats. Des mutants. Des "Dégénérés" comme la presse les appelait. Des visages défigurés par des gènes défavorisés et des muscles boostés par des pouvoirs détonants. Soit trop dangereux, soit trop gênants, ces rebus de la société vivaient ici, pour le meilleur et pour le pire. Ils avaient peut-être tout perdu, ils étaient peut-être esseulés et solitaires, mais ils n'étaient plus seuls.

Megalopolis était un lieu à double tranchant. Lorsque la périphérie de la Grosse Pomme avait fini par toucher Philadelphie et que le maire de New-York était décédé dans la catastrophe qui avait fait couler un tiers de la ville, le gouvernement avait décidé de les réunir sous la même bannière en les rebaptisant. Divisée en trois quartiers bien distincts, Megalopolis offrait une compartimentation à l'image de l'histoire médiévale. Les Hommes n'apprendront-ils jamais de leurs erreurs ?

À l'est s'étendaient les restes de New-York avec, pour derniers vestiges debout, Manhattan et une partie de Brooklyn. Surnommée la Petite Pomme, Liberty Ville ou encore la Dame dans l'Eau en référence à la Statue de la Liberté aux pieds immergés, la Ville-Basse restait toutefois très populaire. C'était là que tout se passait, c'était là qu'on se battait, c'était là qu'on vivait. L'ancien New-Jersey, avec une nouvelle vue sur l'océan et ses plages découvertes était devenu une sorte de dortoir pour les familles modestes sans pour autant être riches. Des lignes droites d'habitations et de jardins clôturés, le tout bien quadrillé, c'était la Ville-Médiane. Et Philadelphie, la moins touchée par les dégâts des eaux, était belle et grande, lumineuse et propre. Ses gratte-ciels touchaient les nuages et sa tour de verre interactive attirait les touristes du monde entier. On l'appelait la Ville-Haute.

(que je garde pour plus tard pour les posts de Bogdan):

Au dernier coup de boots, la grille céda enfin. Le plâtre grossièrement posé sur les jointures servait à peine à camoufler l’ouverture qui donnait sur les anciens conduits d’aération.
Vous savez ce qu’il se passe quand vous devez construire de nouveaux bâtiments sur une surface qui, elle, a rapetissé ? Et bien vous faites toujours plus haut, mais surtout, vous recyclez. En gros, vous prenez un vieux truc, mettons un ancien centre commercial, vous cassez tout l’intérieur, vous conservez les murs, vous enlevez le toit et vous lui rajoutez des étages. Pour peu que vous ayez de l’argent, vous lui offrez même un beau ravalement de façade. On en oublie vite ce que c'était à l'origine.
Dans la Haute, du fric on n’en manquait pas. Ce dont on manquait, c’était de méfiance vis-à-vis des blondes d’à peine vingt piges, gosses des rues bien décidées à se tailler « avec » la part du lion, que ledit lion en question veuille lui laisser un bout de son festin ou pas.
Personne ne s'était vraiment intéressé à ce qui existait avant ce magnifique complexe hôtelier, extension du casino. Sky, si.

Alors comme ça on ne la voulait pas à la soirée du siècle ? Sans blague ! Bogdan n’avait même pas pris la peine de réfléchir à la question. Ce type avait ses entrées dans le grand monde, celui avec les bijoux, les robes de luxe, les cigares cubain, les hydrophones derniers cris, les journalistes people aux dents longues, et il ne partageait même pas ? Tout ce qu’elle demandait, elle, c’était des paillettes dans sa vie de souillon. De la reconnaissance aussi, pour ce dont elle était capable. Une Cyber, vous avez beau dire, ça peut vous sauver une journée ! Elle pouvait l’aider dans la mission que lui avait confiée Six, elle en était sûre. Mais non ! Rien à faire. Ni l’un ni l’autre n’avaient voulu lui donner sa chance.

Ressassant encore leur refus catégorique, Sky maugréa avec aigreur, tandis qu’elle évaluait la distance entre l’ouverture et le sol. Même pas deux mètres. Trop facile. Avec prudence, elle descella la grille qui ne tenait plus que par un fil, puis la fit glisser le long du mur pour réduire sa chute et le bruit qui ne manquerait pas de s’ensuivre. Les drones de surveillance n’étaient équipés que de caméra d’après ses renseignements. Cependant, elle préférait ne prendre aucun risque. Elle attendit quelques secondes après que le bruit métallique ait brisé le silence de la remise, où s’élevaient des monticules de chaises d’appoint. C’est bien beau les holoconférences ! N’empêche qu’il vous fallait toujours un machin confortable pour poser votre cul. Les chaises, c’est indémodable. On mésestime leur utilité. Comme elle.

Le pouvoir atypique de Bogdan l'avait sorti des rues et l'avait élevé dans les plus hautes sphères de Megalopolis. Malgré tout, il n'oubliait jamais d'où il venait et quand Six avait fait appel à lui pour l'aider, il avait bien entendu accepté, non sans quelques hésitations toutefois. La mission était assez simple. Bogdan devait s'approcher le plus possible du maire afin de cloner son agenda. Ainsi, Six aurait le détails de tous ses déplacements pour les semaines à venir, elle pourrait aisément planifier ses actions. Une rebelle, pour sûr, mais une rebelle maligne et organisée qui avait su s'entourer. Tout aurait dû se dérouler comme prévu, dans la plus grande des discrétions : Bogdan se serait approché du maire, l'aurait félicité pour sa réélection, aurait complimenté la beauté de sa charmante femme - bien sûr il n'aurait pas pensé une seule de ces choses - et pendant ce temps, son holophone dans sa poche aurait fait tout le travail pour lui.

C'était sans compter sur Sky. Bogdan et Six l'attendaient au tournant. Cette sale gosse n'avait jamais accepté la négation, à part si elle en était la parolière. Ils avaient été catégoriques, mais lui savait qu'elle trouverait un moyen d'être de la partie. Aussi, ses yeux scrutaient toute l'assistance. Plus ils étaient maigres et moches, plus ils étaient riches. Bogdan haïssait cette société, il détestait tout ce qu'ils représentaient et cette image inhumaine chirurgicalement reconstruite. Si on peut appeler ça construire... Malgré tout, pas de Sky. Il aurait aimé se concentrer pleinement sur sa mission sans avoir à se soucier de l'adolescente imprudente.

Approcher le maire ne fut pas difficile. Bogdan lui serra la main, offrit son plus beau sourire, flatta les égos de toutes les âmes présentes, puis s'en retourna au buffet. Un regard à son holophone, il fit le tri. La manipulation avait bien fonctionné et il possédait à présent l'agenda de toutes les personnes à moins d'un mètre de lui au moment de l'opération. Sauf le maire lui-même.

Bogdan étouffa un juron dans sa gorge. La vie n'était jamais facile, en tout cas, pas pour lui. Il roula des yeux. Pour une fois, il aurait tant aimé profiter pleinement de la soirée et se goinfrer sans avoir besoin d'excuses. C'est alors qu'il remarqua une personne s'approcher du maire, un holophone en main : un jeune homme aux gestes mal assurés, sûrement un petit nouveau. Ils échangèrent quelques mots et se séparèrent à nouveau. C'est alors que Bogdan comprit qu'il s'était trompé de cible. Mais avant qu'il n'ait pu rectifier son tir, le secrétaire prenait déjà la tangente vers les couloirs de l'hôtel.

Citation :

SUCCÈS SUCCÈS : Personne ne garde l'accès aux couloirs, après tout, ce n'est qu'un couloir menant vers l'extérieur et les ascenseurs sont régis par les cartes magnétiques. Si t'en as pas, il répond pas.
SUCCÈS ÉCHEC : Un mutant garde le couloir, mais Bogdan arrive à le pipoter pour passer.
ÉCHEC SUCCÈS : C'est l'heure de la relève entre deux agents, Bogdan arrive à se faufiler sans être vu.
ÉCHEC ÉCHEC : Le garde du couloir empêche de passer quiconque n'a pas sa carte magnétique menant aux chambres. t'as des baskets, tu passes pas.

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'Quitte ou double' :
 

En s’approchant de la porte, elle fit glisser les bretelles de son sac à dos le long de ses bras. Dans la poche ventrale, elle avait pris soin d’emporter une trousse d’outillage informatique. Cela avait deux avantages : celui de la dépanner quand elle devait intervenir sur quelques interfaces récalcitrantes, et celui de lui permettre de forcer les serrures à l’ancienne.
Elle ne s’était pas trompée. La remise ne possédait pas de lecteur optique. Une bonne vieille clé des familles.
« Sky in da plaZ » murmura-t-elle alors qu’elle s’agenouillait devant le battant. En chantonnant, elle s’attela à la tâche. Le verrou céda en deux minutes à peine. Parfait.
Le plus dur restait à venir.
Elle lissa sa robe de soirée – un fourreau fendu en lamé argent qui brillait à vous crever un œil – qu’elle portait par-dessus ses rangers élimées. Son sac contenait aussi une paire d’escarpins de qualité qu’elle avait chourée dans une boutique de la ville moyenne. Il lui faudrait opérer un passage éclair par les toilettes pour dame histoire de parfaire son maquillage et sa coiffure. Alors, elle pourrait faire sa grande entrée. TADAAA !
Restait qu’elle devait d’abord descendre d’un étage, en empruntant les couloirs surveillés par des drones. Elle n’avait pas le protocole des rondes. Elle compterait sur son instinct. Ensuite, elle pourrait toujours passer par les escaliers pour atteindre le rez-de-chaussée. Mentalement, elle se repassa son parcours. Zut ! Elle était un peu désorientée après son escapade dans les conduits, où était donc le photocall ? Garin avait été très clair « Tu te fais prendre en photo avec n’importe quelle star par les journalistes people. Je veux ma copine dans un magazine! Et m’oublie pas un menu, j’veux aussi savoir ce qu’ils bouffent dans ce genre de soirée »
Ah ca ! il avait largement contribué à sa présence ici, cet idiot. Son petit ami n’était pas le dernier pour relever des défis débiles, mais il adorait par-dessus la provoquer. Surtout quand Bogdan et Six avaient bien préparé le terrain. Surement qu’il était peinard à l’appart en train de se marrer comme une baleine en l’imaginant ramper dans des tuyaux. « Va chier, Garin ! » dit-elle à voix haute, non sans une tonne de tendresse tout de même.
Après une grande inspiration, elle ouvrit la porte et s’élança dans le couloir.

Citation :

Réussite x2 : Désert. Elle atteint le palier des ascenseurs sans problème.
Réussite Echec : Un drone est bien présent mais il est passé devant la porte déjà. Si elle avant sur la pointe des pieds et longe les murs, elle atteint le palier.
Echec Réussite : Un drone arrive droit dans sa direction. Elle a encore le temps de rentrer dans le placard, mais elle perd du temps.
Echec Echec : Prise en flag. Elle doit utiliser son pouvoir pour intercepter le message d’alerte.

Elle risqua un œil par l’entrebâillement de la porte : le drone venait juste de passer devant elle et s’en allait déjà à l’autre bout du couloir. Sky ne mesura sa chance qu’une fraction de seconde avant d’en profiter. Ni une ni deux, elle s’élança en direction du palier des ascenseurs. Elle ne doutait pas que sa trogne serait fichée par les caméras de surveillance fixe mais hey ! Ça lui laisserait largement le temps d’accomplir son petit forfait.
Comme elle l’avait prévu, la cage des escaliers se secours, quoique habillement dissimulée pour des raisons esthétiques, juxtaposait les cabines de verre qui, non contentes de vous faire passer d’un étage à l’autre, vous offraient une vue plongeante sur la réception en contrebas. Au diable la prudence ! La fortune était avec elle, non ? Elle appuya sur le bouton, patienta et lorsque les portes s’ouvrirent dans un chuintement discret, elle grimpa dans la bulle. Ses yeux se gavèrent du spectacle pendant la descente. Tout scintillait dans une débauche de luxe à vous en faire tourner la tête. Près de l’entrée principale, là où du personnel en complet s’assurer du bon déroulement de l’arrivée des stars de la soirée, elle remarqua des flashs qui éclairaient par intermittence le hall. Voici qu’elle avait la réponse à sa question.
Un tintement léger lui indiqua qu’elle était arrivée à destination. Devant sa cabine qui s’ouvrait, un homme tiré à quatre épingles consultait son hydraphone. Surprise, elle afficha un sourire assuré, comme si sa présence ici était tout à fait normale, puis sortit. C’est seulement quand elle voulut prendre la direction du bal, qu’elle vit Bogdan sur son chemin, en train de discuter avec le vigile.

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'Quitte ou double' :