2076. Côte est des Etats-Unis. Megalopolis est le centre névralgique d'une guerre géo-politique mondiale depuis qu'un attentat biologique en 2026 a divisé l'humanité en deux populations bien distinctes : ceux qui se battent pour le futur, et ceux qui font avec le présent.
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 [CLOS] [Abel/Garin] Turning point

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Garin DeLyons
Garin DeLyons
Septembre 2074


Quelle heure était-il ? Trois... Quatre heure du matin ? J'étais lessivé, épuisé. Je transpirais à grosses gouttes, la tête me tournait, je peinais à respirer comme jamais. On ne m'avait jamais tiré dessus avant. J'ai gravi l'unique marche pour monter dans ma caravane et je me suis effondré sur la banquette, le visage rougi et ruisselant. Les bleus commençaient à marquer mon visage et ma lèvre avait enflé. J'ai enlevé mon t-shirt et j'ai attrapé un couteau sur le bord de l'évier. La chaleur dans le Sanctuaire s'était engouffrée dans la caravane et me tournait d'autant plus la tête. Tout mon corps arborait cette lueur nacrée, heureusement que j'étais habillé pour arriver jusque là, sinon on aurait dit qu'une luciole boitait. D'un coup de levier, j'ai retiré la balle qui s'était écrasée dans ma cuisse. J'avais eu chaud. J'aurais presque pu la retirer à mains nues. J'ai retiré mon t-shirt en tremblant et je l'ai plaqué sur ma cuisse, je ne devais vraiment pas avoir bonne mine. Ma respiration était rauque. J'avais couru jusqu'ici, je n'avais pas pris le risque de récupérer ma voiture, celle-ci restée au port. Je ne m'étais pas arrêté, mes poumons étaient en feu et je savais que mon pouvoir se manifestait. C'était une bonne chose de se rendre compte que je n'explosais pas aussi facilement que je pouvais le croire. Si nous avions été en pleine journée, en plein cagnard, je n'aurais peut-être autant donné cher de ma peau.

Je me suis levé, somnolant, à moitié dans les vappes. La douleur était fulgurante dans ma cuisse, je ne pouvais plus poser le pied. L'adrénaline m'avait quitté, les forces aussi. Il fallait que je désinfecte mais je n'avais rien ici. J'ai fouillé mes placards mais rien, pas une goutte d'alcool. Je ne pouvais pas aller voir Annie, elle  se serait inquiétée, aurait posé trop de questions. Mais aller au Saloon, si Abel m'entendait, il poserait moins de questions mais elles auraient plus de poids. J'étais coincé ici. Et puis, au moment où je me suis dit tant pis et que je me suis retourné pour aller au Saloon, je me suis juste écroulé. La fatigue, la trouille, le manque de respiration correcte, la balle et les coups, je me suis simplement effondré dans l'allée de ma caravane, en laissant la porte ouverte.

Un filet lumineux me brûlait la main. Je crois que c'est ça qui m'a réveillé. Ca ou Annie qui criait le nom d'Abel après m'avoir secoué. Je ne sais plus, c'était flou. Je me souviens avoir entendu quelqu'un sauter de ma caravane et courir dans le cailloux. Je n'ai pas senti ma jambe tout de suite. Je me suis redressé sur un coude en toussant et j'ai grogné en bougeant le genou, ravivant la douleur dans ma cuisse. Ca m'avait à peine touché mais suffisamment pour me rappeler que je n'étais pas invincible. Je me suis redressé, la tête d'une lourdeur incroyable, et je me suis assis, dos contre le placard de l'évier. J'ai fermé les yeux un instant et j'ai reniflé. J'ai levé une main en tâtonnant le rebord, je savais que j'avais mis une bouteille d'eau par là. Quand je l'ai touchée, je l'ai serrée entre mes doigts et portée à mes lèvres pour en boire le contenu, presque entier, même au risque de m'étrangler avec. J'ai penché la tête pour regarder ma cuisse et j'ai versé l'eau sur la plaie en soupirant de soulagement. J'ai laissé la bouteille retomber au sol et j'ai attendu. Je respirais un peu mieux maintenant et je ne luisais plus. Mais j'arborais des bleus magnifiques sur un côté du visage. Je crois que je me suis rendormi là.
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Abel Henoch
Abel Henoch

Abel n’avait pas transigé à ses habitudes. Il avait profité du lever du soleil, méditant sur les dernières évolutions de la politique du pays, les positions de l’Underground, les avancements de Liberation… Bref, le point sur la situation. Après son petit déjeuner à écouter les informations, il avait ensuite passé une heure à renforcer la façade tout en réfléchissant à leur prochain mouvement. Liberation devait toujours marcher sur des oeufs, que ce soit vis à vis du gouvernement ou de l’Underground. Les deux étaient un problème, les deux lui mettaient des batons dans les pattes. Sans parler du fait que penser à l’Underground lui donnait toujours un pincement au coeur. Il avait beau l’ignorer, ses relations avec l’Underground étaient grandement liées à celles qu’il entretenait avec Maddison…

Il allait passer sur le toit quand Annie était arrivée, en panique, et l’avait à moitié arraché de l’échelle.
« Hé, ma belle, du calme ! Qu’est-ce qu’il t’arrive ? » lui avait-il demandé en riant.
« Bouge toiiiii ! C’est Garin ! » Abel cessa de rire et soupira discrètement.
« Qu’est-ce qu’il a fait encore ? »
« J’en sais rien, mais il est blessé ! » Abel jura et précéda Annie en direction de la caravane.

Il savait que Garin n’en manquait pas une. Quand il n’était pas maladroit, il contestait toutes les décisions. Ok peut être pas toute, mais s’il passait autant de temps à bosser que le temps qu’il passait à discuter, ils domineraient déjà le pays. Et puis Abel n’avait toujours pas accepté que le transfuge de la CIA prête un peu trop d’attention à sa soeur. Ca le conduisait là encore à prendre des décisions inconsidérées, oubliant parfois leurs objectifs pour ses sentiments personnels, et Abel avait du mal à le tolérer. Qu’avait-il encore inventé, cette fois ?

Il ouvrit la porte de la caravane qu’occupait Garin et le trouva inanimé sur le sol. Il avait des hématomes à n’en plus finir, et une sale plaie à la cuisse. Il se concentra rapidement sur la circulation des fluides dans le corps du jeune homme, mais ne détecta rien d’alarmant. Il commença donc à lui tapoter les joues sans ménagement.
« Tu pourrais être plus cool… Il a morflé... »
« Bah la douleur le réveillera plus vite. Il est pas mourant, et il doit m’expliquer des choses... Allez Garin ! » Trouduc… « La belle au bois qui dort ! Faut se réveiller ! »
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Garin DeLyons
Garin DeLyons
Les baffes d'Abel m'ont ramené à moi plus vite que je ne l'aurais voulu. J'ai cligné des yeux alors que la douleur dans ma tête revenait, bien plus forte que celle dans ma cuisse. J'ai inspiré profondément en crispant les yeux, une main sur la tempe, c'est que ça tournait, dis donc. Et puis je les ai rouverts pour voir Abel. Mon sang n'a fait qu'un tour. C'était un peu comme voir le démon en personne, trop près, trop tôt. Ma poitrine s'est soulevée, pris de panique et j'ai écarquillé les yeux avant de balancer ma jambe pour le reculer et le plaquer sur la banquette en bois derrière lui, mon pied sur son torse avant de le récupérer.

– Garin !

– Me touche pas !

Annie avait crié et s'était accroupie à côté de moi pour me prendre par le bras et m'empêcher de me ruer sur Abel. Ce n'était pas la première fois qu'elle devait s'interposer entre nous. C'était bien trop régulier, ces dernières semaines. J'ai serré les dents en regardant Abel d'un oeil mauvais, la sueur perlant sur mon front.

– Qu'est-ce qui t'est arrivé, t'as vu dans quel état tu es ? Je suis allée chercher Abel, tu ne te réveillais pas quand je te secouais !

Je n'ai pas quitté Abel des yeux, le souffle court mais profond.

– Le FBI a fait un raid sur les docks hier soir. Un truc de drogues avec un contrôle de puces à la clé, le genre bien merdique. Un agent infiltré chez nous depuis plusieurs semaines. Il m'a tiré une balle dans la jambe quand j'ai tenté de m'enfuir. Il m'a cogné comme s'il avait la rage au ventre ou que c'était moi le responsable de ce trafic dont j'ignorais tout.

Annie me frottait le bras en regardant Abel d'un oeil inquiet. C'était bien la seule, d'ailleurs. Mais Annie aimait tout le monde.
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Abel Henoch
Abel Henoch

Il s’était attendu à beaucoup de choses - venant de Garin en même temps - mais certainement pas à être cueilli par un pied dans la poitrine. Il se retrouva le souffle coupé par le choc, et tout aussi vite, très en colère. Il en avait plus qu’assez du jeune homme et de ses réactions débiles. Bon ok, Abel exagérait, sans doute. Il avait des a-priori, sans aucun doute ! On se demandait pourquoi d’ailleurs… Toujours est-il que la réaction intempestive - qu’il aurait comprise pour n’importe qui d’autre - réveilla sa colère. Il n’était pas du genre emporté, mais là, il se redressa aussitôt, prêt à lui sauter à la gorge. Sans Annie, c’est sans doute ce qu’il aurait fait. Mais il n’avait pas besoin que la jeune femme le retienne. Il se contenta de serrer les poings et de rester debout, noyant Garin sous son regard méprisant.

« Il a encore trainé où il fallait pas… » répondit-il à la place de Garin. Il le méprisait pour sa capacité à se foutre dans la mouise sans avoir besoin d’être beaucoup poussé. Mais à mesure que le jeune homme parlait, l’expression d’Abel vira de la colère enflammée à la rage froide, autrement plus dangereuse.

« Tu t’es fait taper sur la gueule par un type du FBI ? Dans une histoire de drogue ?! Putain, il a repéré que t’avais pas de puce ?! » Il avait levé le volume à chaque phrase, pour finir par taper sur la première surface qui se présentait - la paroi de la caravane. Dans d’autres circonstances, il se serait sans doute fait mal. Mais là, ça le laissait indifférent.

« Abel... »
« S’ils ont ton sang, tu sais ce qu’ils vont en faire, pauvre con ?! »
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Garin DeLyons
Garin DeLyons
Annie m'a aidé à me relever et je n'ai pas quitté Abel des yeux. S'il bougeait, je bougeais. Nous ne nous aimions déjà pas. Mais cette histoire avait scellé notre destin. Il avait raison sur une chose : j'attirais les ennuis comme des mouches. A croire que ça me poursuivait, où que j'aille et quoi que je fasse. Et j'aurais aimé qu'il le comprenne un jour. Tout n'était pas de ma faute. Encore moins le fait que sa soeur ait jeté son dévolu sur moi malgré ses remontrances. Quand il a frappé ma caravane, je me suis dressé de toute ma hauteur - qui n'égalait pas la sienne malheureusement - et je l'ai violemment repoussé des mains sur son torse.

_ Va te faire foutre, Abel, c'est lui qui m'a tiré dessus ! Tu crois vraiment que j'ai attendu qu'ils remarquent que j'avais pas de puce ? On était cinq à s'enfuir et c'est moi qu'il a poursuivi ! J'ai rien à voir avec ce traffic, j'étais pas au courant, ok ?

Annie a élevé la voix, espérant nous départager mais elle a préféré ne pas s'approcher. Un coup aurait pu si vite partir et s'il y avait une chose que Abel et moi partagions : c'était notre sang chaud. J'ai tiré mon pantalon pour montrer la blessure qui avait séché. Annie a plaqué sa main sur sa bouche. Pour une blessure superficielle - traduction : qui aurait pu être bien pire - ça ne devait pas être si joli à voir.

_ Ils n'ont pas mon sang, je saigne pas !

_ Garin ?

J'avais fixé Abel de mon regard le plus mauvais. S'il voulait se battre, j'étais réveillé maintenant, je pouvais à nouveau en découdre, à n'en point douter ! J'ai vivement tourné la tête vers Annie qui a relevé les yeux sur moi avec un objet dans la main.

_ Quoi !

_ Qu'est-ce que c'est ?

Elle a montré une balle entre ses doigts qui avait dû tomber de ma poche et m'a regardé sans comprendre. J'ai cligné des yeux. Je ne m'en souvenais pas. Du moins, ça m'est revenu... Mais je n'ai pas eu envie de le dire. Parce que soudain, je me suis rendu compte d'une erreur que j'avais commise. Une grave erreur.

_ C'est une balle. Ca se voit pas ?

_ Elle est pas à nous, Garin... C'est pas un de nos calibres.
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Abel Henoch
Abel Henoch

Abel était tendu comme un arc. Garin était arrivé comme un cheveu sur la soupe. La seule chose constructive qu’il avait fait - sans que ce soit vraiment au gout de Abel - c’était de s’intéresser à sa soeur. Pour tout le reste, il n’était qu’un boulet. Il n’était même pas certain qu’il ait eu la moindre envie de s’impliquer dans leur lutte. Mais il était entêté, et insubordonné. Abel n’était pas forcément fan des moutons, mais pour pouvoir opérer, il fallait que les ordres soient respectés.
En opération, une fraction de seconde pouvait signifier la vie ou la mort. C’était le travail de Abel que de prendre ces décisions qui engageaient la vie de toute l’unité dans le feu de l’action. Mais ils ne pouvait pas se permettre qu’une de ses recrues remette les ordres en question au mauvais moment. Et Abel ne lui faisait aucune confiance.

« T’aurais DU être au courant ! Bordel, Garin, tu aurais du savoir ce qu’il se passait dans ton dos, tu devrait avoir le nez sur tout ce qui se passe autours de toi au lieu de te concentrer sur ton putain de nombril ! Si t’avais été plus attentif, tu aurais SU ! »

Quand Garin dévoila sa blessure, Abel grimaca. Pas parce qu’il était impressionné - il en avait vu d’autres - mais parce que c’était la manifestation de la connerie de sa recrue.
Abel avait juste envie de lui défoncer la tronche à coup de poings. Ca lui aurait fait le plus grand bien. Ca LEUR aurait fait le plus grand bien. A lui, pour se défouler. A Garin, pour prendre du plomb dans la tête.

« Si la balle est ressortie, c’est tout comme ! »

Abel serra la machoire. Les mains sur les hanches, il regardait par une fenêtre de la caravane, réfléchissant à ce qu’il convenait de faire. Pas question que Garin se balade dans Megalopolis avant que les choses ne se tassent. La question était de savoir comment lui faire entendre raison. Abel n’avait aucun moyen de le garder au Sanctuaire, à part l’enfermer dans sa caravane. Et encore. Mais il était prêt à parier que Garin filerait courir le guilledou dès qu’il aurait le dos tourner. Petit emmerdeur…

Il en était encore à réfléchir quand Annie interpella Garin - qui lui répondit vertement. Abel lui lança un regard noir - le genre parent mécontent à gamin impoli - avant de réaliser de quoi parlait Annie. Il se baissa pour ramasser la balle intacte qui ne venait effectivement pas de l’Arsenal, c’était certain. Abel contrôlait tout ce qui entrait dans le sous-sol de son habitation et faisait un inventaire toutes les semaines, plus si une mission se préparait. Il connaissait leurs stocks par coeur. Et Liberation n’avait pas de balle de ce calibre, en effet.
Il penserait plus tard à féliciter Annie pour sa vigilance. En attendant, il lança un regard suspicieux à Garin.

« D’où vient cette balle ? » Et à la façon dont il regardait le jeune homme, Garin n’avait pas intérêt à le baratiner.
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Garin DeLyons
Garin DeLyons
– Je n'ai fais que travailler, bon sang, ramener un peu de tunes ! Je m'amuse pas à être curieux de tout parce que je m'ennuie, contrairement à toi ! J'étais PAS en mission, que je sache ! Certains d'entre nous ont une VIE en dehors de toi !

Et c'était vrai. J'étais un docker comme un autre. Clandestin comme beaucoup d'autres. Si j'avais choisi ce travail, c'était bien parce qu'il m'assurait la tranquillité. Si ce mec du FBI ne s'était pas servi de nous... Mais là où Abel avait raison, c'est que j'aurais dû m'en rendre compte. Mes sens n'étaient pas aussi aiguisés qu'eux, je n'avais pas passé autant de temps qu'eux en mission. J'avais malheureusement dû passer des mois en quarantaine à cause de l'apprentissage de mon pouvoir. Mais ça, personne ne le savait et personne ne pouvait le savoir. Je n'étais pas un agent d'exception, j'avais des réflexes, un bon instinct... Mais j'étais loin d'être aussi infaillible qu'eux. J'ai grimacé en reportant mon regard sur Abel lorsqu'il a cru que la balle était ressortie de ma jambe. J'ai secoué la tête en m'efforçant de ne pas lui cracher dessus.

– Si elle était ressortie, j'aurais saigné. Non, je l'ai retirée en revenant.

Et... Je pensais pouvoir m'en sortir comme ça. Mais la question d'Annie et mes yeux fixés sur la balle m'ont ravivé la mémoire de la veille. Mon sang n'a fait qu'un tour et mon coeur a manqué un battement. J'ai dégluti en me rendant compte de ce que j'avais fait. Ou du moins, de ce que j'avais cru faire. Dans la panique, j'avais joué les malins mais j'en avais oublié d'être intelligent. C'était un de mes gros défauts. Mes lèvres se sont entrouvertes. Bien sûr, encore une fois, Abel avait raison sur mon compte. Il fallait qu'il ait raison. La question était : pouvais-je m'offrir le luxe de ne pas croire Abel capable du pire ? En ce qui me concernait, c'était peine perdue. Il me détestait presque autant que je le haïssais. Et je prenais bien trop de temps pour répondre.

Depuis son départ, j'étais devenu l'ombre de moi-même. J'étais fatigué, épuisé de devoir contenir mon pouvoir, ce qui me prenait une énergie hors du commun. Annie posait sur moi un regard inquiet. Elle aussi connaissait Abel et elle me connaissait. Elle savait qu'elle venait de poser une question dangereuse mais elle n'avait pas eu le choix. Peut-être que dans d'autres circonstances, si nous avions été seuls, elle m'aurait protégé. Peut-être même qu'elle regrettait d'avoir fait appel à Abel. Je ne lui en voulais même pas. J'ai juste su que j'en avais fini avec Liberation. J'avais quitté Abel le jour où il avait décidé du sort de l'un de nous en l'abandonnant à notre pire rival. Alors je l'ai poussée. J'ai pris Annie par les épaules et du même geste, la faisant chavirer, je l'ai poussée contre Abel pour lui faire perdre l'équilibre pendant que je m'enfuyais à toutes jambes. Je n'étais pas sûr d'avoir la chance de m'excuser auprès d'elle un jour mais une chose était sûre : quand il en allait de ma survie, je passais en priorité.

J'ai sauté de la marche de ma caravane et j'ai commencé à courir.
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Abel Henoch
Abel Henoch
Ses excuses sur ce qui avait amené sa présence sur les docks ne lui firent ni chaud ni froid. Il n’avait aucune tolérance pour les erreurs, surtout lorsqu’il s’agissait uniquement d’un manque de vigilance. Garin n’avait pas été piégé, pas pris par surprise. L’agent infiltré avait été sous son nez pendant des semaines, et il n’avait rien vu. Il avait baissé sa garde.

« On n’a PAS besoin de thune, je te rappelle ! On a une source de revenus suffisante pour nous payer ce dont on a besoin pour mener à bien notre mission ! Dois-je te rappeler que nous rejoindre signifie que tu es en mission PERMANENTE ?! Le gouvernement nous traque. LES gouvernements ! Ils se feraient un plaisir de nous mettre sous clé, et de faire de nous des gentils cobayes. Dois-je te rappeler à quoi Annie était destinée ? » Cracha-t-il en désignant la derniere recrue du groupe. Ils l’avaient tirée d’un convoi qu’ils avaient pu repérer grâce au fichier Stenton. Annie et d’autres Positifs partait pour un laboratoire de tests clandestin, qui oeuvrait pour le compte d’un grand groupe, pas encore identifié. Liberation les avait libéré, et Abel avait décidé de garder Annie, pressentant un fort potentiel. Ce que ses geôliers lui réservaient, il préférait ne pas y penser.
Mais que Garin considérait qu’il s’amusait le faisait sortir de ses gonds.
« S’amuser à être curieux parce que… BON SANG GARIN ! » cria-t-il en ignorant les paroles apaisantes d’Annie. « Ouvre les yeux, c’est une question de SURVIE ! La tienne, la mienne, la NOTRE ! » Il répugnait à le dire, mais Garin et lui savaient très bien à qui il pensait en passant au pluriel. Les deux hommes n’avaient qu’un seul point commun, dont Abel se serait bien passé, mais qui existait pourtant. Et ce point commun était pour l’instant sous les radars.

Et puis il attendit la réponse à sa question. Qui arriva sous une forme qu’il n’escomptait pas. Plutôt que de répondre, Garin prit la fuite. Il projeta Annie contre Abel. Les deux s’écroulèrent sur la banquette de la caravane. Annie poussa un glapissement, et Abel grogna.

« Petit enfoiré ! » Bien. Garin lui simplifiait clairement la décision. RIEN ne l’empêcherait maintenant de prendre la décision qui s’imposait, et il se sentait un peu trop heureux de la prendre. Il prendrait le temps d’y réfléchir plus tard. En attendant, Garin courait comme un dératé et il n’était pas question qu’il s’échappe. Abel repoussa Annie sans ménagement - il s’excuserait plus tard - et partit à sa suite. « Reste là ! C’est un ordre ! » Brailla-t-il à Annie, avant de sauter la marche de la caravane à son tour. Il ne voulait pas que Annie soit un dommage collatéral de leurs différends, à Garin et lui, et donc sa meilleure place était à l’abri, dans la caravane.

Par réflexe, il leva la main en direction de Garin, même si ce n’était pas nécessaire : son pouvoir s’exprimait tout aussi facilement sans geste, tout se passait dans sa tête. Mais son désir de rattraper sa cible s’exprima physiquement de cette façon. Et puis il se concentra…
Sa premiere intention n’était pas de le tuer. Pas encore. Simplement l’arrêter.
Il visualisa les poumons de Garin, ainsi qu’il l’avait appris en Sibérie. Sa formation comprenait des cours intensifs d’anatomie et de physiologie : connaissez parfaitement le corps humain et son fonctionnement, vous ferez un tueur bien plus efficace. Il se figura donc les alvéoles qui se gonflaient et se vidaient au rythme effréné, imposé par la course de Garin. Et il les imagina se remplir progressivement d’eau, puisant dans l’humidité ambiante pour la concentrer dans les poumons du jeune homme. Il les vit se remplir et ralentir progressivement leur activité. Garin ne courrait pas bien longtemps encore.

Lorsqu’il fut tombé, suffocant, Abel s’approcha, l’air mauvais et profondément méprisant, tout en réduisant la présence de l’eau dans les poumons de sa cible. Et puis il s’accroupit.
« Reste par terre. Tu sais, comme je vois les choses, tu as deux possibilités. Soit tu as fait ce qu’il fallait, et tu gagnes un tour gratuit. Jamais su ce que ça voulait dire exactement d’ailleurs… Bref… Soit tu as déconné, ouvert une faille qui met le groupe en danger. Alors fait bien attention à ce que tu vas dire. Explique moi exactement d’où vient cette balle, ce que tu as fait et n’essaye pas de me baratiner. Parce que dans ce cas, tu seras perdant. Totalement. » Ce n’était pas une menace en l’air, ils le savaient tous les deux.
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Garin DeLyons
Garin DeLyons
Je n'aime pas l'eau. Je ne supporte pas l'eau. J'ai des subterfuges pour éviter de prendre des douches ou alors elles sont d'une rapidité record. Voilà qui devait expliquer pourquoi Abel et moi étions incapable de coopérer ni de nous apprécier, même un peu. Je ne l'admirais pas, je le respectais à peine, pour moi il était dangereux et ce n'était pas le message que je voulais faire passer avec Liberation. Non, effectivement, mon regard et mes opinions n'étaient peut-être pas si proches de ceux du groupuscule, finalement. Ce qui m'attristait. En deux ans, je n'avais pas réussi à m'imposer. Sur Abel ou n'importe qui d'autre, d'ailleurs. Je voulais que l'on voit les choses d'une manière plus souple, peut-être. Moins terroriste. Non, je ne voulais pas être en mission permanente et non, je ne voulais pas qu'Abel subvienne à mes besoins. Je voulais gagner mon propre argent, je voulais la sensation que ma vie m'appartenait encore, que je pouvais toujours être normal. Et bien... Peut-être pas dans ce pays. Alors, quand j'ai senti l'eau dans mes poumons, je me suis effondré sans avoir le temps de lutter. J'ai bien entendu le nom d'Abel qu'on criait mais je n'y ai prêté aucune attention.

Suffoquant, je me suis retourné sur le ventre pour tenter de me redresser, après avoir poussé un léger cri de douleur quand le sable rocailleux Mon visage devenait rouge à manquer d'air et c'était une sensation que je connaissais bien trop et à laquelle je ne m'étais jamais fait. "Reste par terre", il m'aurait été difficile de faire autrement. Abel ignorait totalement le pouvoir qu'il avait sur moi. Quoiqu'il fasse, c'était déjà trop tard. Avec ou sans eau dans les poumons, j'étouffais.

– J'ai vidé son chargeur.

Annie était restée en retrait, se demandant si Abel allait oser faire pression sur moi avec force. J'avais merdé. J'avais déconné à plein tube. Mais comment lui dire ?

– Mais je n'ai pas eu le temps de récupérer son arme. Ils arrivaient, ils étaient trop nombreux. J'ai manqué de chance, c'était le frère d'une fille qu'on a rencontrée dans un bar avec Jason. Il est du genre surprotecteur, alors...

J'ai eu la folie grandeur nature de lui esquisser un sourire espiègle, revêche et rebelle, ce qui n'était pas forcément malin de ma part.

– Ca me rappelle quelqu'un, d'ailleurs.
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Abel Henoch
Abel Henoch

S’il avait pensé que cela aurait un quelconque intérêt, Abel lui aurait mis un poing dans sa gueule à sa derniere remarque. Certes, ça l’aurait soulagé. Ca l’aurait détendu. Ca lui aurait permis d’extérioriser tout ce qu’il ressentait depuis que la mission d’infiltration avait tourné d’une manière imprévue. Certes, Abel connaissait maintenant le fin mot de l’histoire. Mais ce n’était pas pour le rassurer. Eve était seule, isolée, dans un monde inconnu, avec des gens inconnus. Elle était capable de se débrouiller - c’était pour ça qu’il l’avait laissée là bas. Mais en étant en pleine possession de ses moyens. Là… Eve était juste exposée. Elle était en danger.

Mais au lieu de se défouler un bon coup - d’autant qu’il savait maintenant ce qu’il allait faire de Garin - il baissa la tête pour regarder entre ses jambes en serrant les lèvres.

« Quand tu auras une famille, des gens auxquels tu tiens, quand tu ne seras plus un petit enfoiré égoïste, tu pourras me juger. Et juger un gars qui s’efforce de protéger les siens et de faire son taf correctement. Contrairement à toi. En plus tu ne connais rien de notre histoire à Eve et moi. Rien. Tu es dans sa vie depuis 2 minutes. Je suis la sienne depuis toujours. Cela étant… »

Il jeta un coup d’oeil derrière lui où Annie se tenait, sur le pas de la porte de la caravane. Elle avait obéi - elle lui obéissait, elle. Il y avait deux types de personnes qui obéissaient : ceux à qui on ne laissait pas le choix - ils l’avaient connu au MSS - et ceux qui avaient confiance en celui qui donnait l’ordre. Il se flattait de penser que ceux qui l’avait suivi et formait leur petite unité appartenaient à la deuxième catégorie. Ces gens là, on pouvait leur faire confiance pour obéir convenablement et pas trahir à la première occasion. Ils étaient 6 à faire partie du groupe opérationnel, plus Annie, pas encore complètement prête. Abel leur faisait confiance à tous. Sauf à Garin. Garin lui avait toujours donné l’impression d’obéir par obligation. Et aujourd’hui… Il avait manqué à son engagement, il avait failli dans son devoir. Pire, il les avait mis en danger en les exposant inutilement.

Il regarda à nouveau Garin. Il n’avait pas une once de mépris. pas de colère. Juste… Il avait un devoir à faire, et il le ferait. Comme le reste. Il avait une mission, un but. Désormais, Garin n’était plus seulement un grain de sable qui grippait la mécanique. Il était un un rocher en travers de la route.

« … nous savons tous les deux ce que ça veut dire. Ils ont tes empreintes. Ils pourront te retrouver, d’une façon ou d’une autre. Tu vas être fiché. Tu es désormais une faille pour notre sécurité à tous. Ils vont te chercher, maintenant que tu es impliqué dans ce trafic, même si tu ne l’étais pas vraiment. Il leur faut un corps pour qu’ils ne remontent jamais jusqu’ici. Crois moi, j’aurais préféré qu’il en soit autrement, mais c’est toi qui a enfreint les règles... » Et pour cette partie, il était sincère : Eve ne lui pardonnerait peut être jamais.

Cela ne l’empêcha pas de se concentrer une nouvelle fois, déterminé à en finir. A nouveau, il visualisa l’eau emplir les poumons du jeune homme. Cette fois, il ne s’arrêterait pas.
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Garin DeLyons
Garin DeLyons
La survie. C’était tout ce qui comptait. Une voix en moi résonnait, me disant que c’était peine perdue de lutter. Ma plus grande faiblesse, j’ai toujours cru qu’il s’agissait d’Eve. De ses doigts caressant mon visage. De ses lèvres me souriant ou de ses yeux me révélant au monde. Avec elle, j’ai toujours cru pouvoir survivre à Abel. J’ai longtemps cru que la personne qui me rayerait de ce monde serait celui à cause de qui j’étais ici, aujourd’hui. Je l’avais vu plusieurs fois dans mes visions. C’est pour cette raison que j’ai continué de me battre. Abel n’était pas dans ma vision. J’ignorais quand je devais mourir, mais je savais comment et devinais de la main de qui. Néanmoins, et si je me trompais ? J’ai continué de ramper tant bien que mal en m’égosillant du reste d’eau dans mes poumons. L’eau était ma véritable faiblesse. Celle que j’avais sous estimée pendant des années. Quand on se croit invincible ou que l’on s’imagine détenir le pouvoir sur sa vie et son destin, on a tendance à être moins regardant sur le véritable danger.

Mais Abel ignorait tout de ma vie. Si j’en avais parlé, ce n’était qu’à Eve et personne d’autre. Il n’avait jamais compris pourquoi je n’avais pas réussi à tirer sur Howard Stenton. Peut-être avais-je conservé un peu de bon sens et qu’il n’était pas dans mes valeurs d’abattre un homme à terre sans défense. J’ai fermé les yeux en recrachant de l’eau et ma quinte de toux a repris. Il me donnait un instant de répit. Voulait-il juste me faire peur, me donner une bonne leçon, ou cette fois en finir réellement avec moi. Ce ne serait pas la première fois qu’il me menaçait et en l’absence d’Eve, il fallait reconnaître qu’il n’y avait plus aucun obstacle entre lui et moi. Pourtant, je n’avais jamais voulu trahir qui que ce soit. Ni Eve, ni Abel, ni Annie, ni personne. Ca avait toujours été comme ça : j’avais manqué de chance depuis ma naissance. Ce n’est pas parce que votre père évolue dans les hautes sphères que votre chemin en est tout tracé. Je n’avais pas connu de grande maison, ni de grande fortune. J’avais eu une mère dépressive, un traitre de père, un ami dont l’ambition se résumait au pouvoir et un amour impossible si l’on comptait Abel en obstacle. Et ce pouvoir qui me tuait à petit feu, un peu plus chaque jour.

Finalement, j’aurais pu avoir envie d’en finir, depuis longtemps. Mais j’avais nourri l’espoir qu’un jour, peut-être, je survivrai à tout ça. Qu’un jour, je vivrai pour moi, pour le monde, que j’existerai, tout simplement. Impression que je n’avais qu’en présence d’Eve. Celle-ci disparue, il ne me restait plus rien. Abel avait raison. J’avais échoué. J’ignore pourquoi, je ne sais pas trop comment, mais j’avais dérapé. J’avais manqué de prudence, j’avais eu « peur ». j’avais manqué à mon devoir et pour autant qu’Abel pouvait le penser, je n’avais jamais cherché à trahir Liberation un seul instant. Peut-être qu’il m’arrivait de croire qu’on allait trop loin et que tout ça n’était pas forcément utile. Mais il faut parfois accomplir de mauvaise actions pour arriver à une bonne conclusion. C’est un sacrifice que Liberation opérait chaque jour. Peut-être n’avais-je tout simplement jamais eu leur force. J’avais enfreint les règles, peut-être… Mais j’ai souri. J’avais quelque chose qu’Abel n’avait pas. Eve appartenait à ma mémoire.

– Tu ne peux pas me tuer. J’ai vécu un milliers de vies avec elle. - Et j’ai ri. - Elle ne se souvient même pas de toi.

La mémoire était une valeur primordiale pour moi. Me souvenir de qui j’étais, d’où je venais, même quand cela m’échappait, je me forçais à me souvenir. Et toutes ces vies dont je me souvenais. Je savais que Abel n’hésiterait plus. J’ai tenté de me redresser sur mes genoux et mes coudes pour évacuer l’eau dans mes poumons qui recommençait à me noyer. Mais ce n’étaient pas les seuls dégâts qu’il occasionnait en moi. J’ai eu cette impression que tout s’effritait, se détruisait dans ma poitrine. Mon rythme cardiaque s’est accéléré d’autant plus et j’ai senti la blessure dans ma cuisse si intense que j’ai cru prendre feu. J’ai encore essayé de me redresser, de me lever, je voulais courir et m’enfuir.

J’ai visualisé Eve et mon idée de nous en aller d’ici. J’aurais voulu l’arracher à son frère depuis longtemps mais c’était impossible. Ma vue a commencé à s’assombrir et j’ai été secoué de hoquets alors que des hurlements se sont faits entendre autour de moi. J’ai vu Eve, une enfant et des flammes. Elle criait, même si je ne comprenais pas ce qu’elle disait, elle tendait la main vers moi. Je voulais la prendre mais une barrière de flammes m’en empêchait. Je n’ai vu que ses yeux. Je ne pouvais plus respirer, la fumée m’en empêchait. Alors comme ça, il n’y avait pas qu’une seule mort pour moi ? J’avais toujours cru qu’une lame me transpercerait le coeur mais il fallait croire que non. Quoiqu’il arrive, elle était toujours là. Peu importait la vie que je menais, je la retrouvais toujours. Même si je peinais à respirer, je me refusais à partir en laissant Abel croire qu’il gagnait. Il était vicieux, mais je l’étais aussi. Alors je lui ai offert tout ce qu’il restait de mon énergie.

– Je reviendrai toujours pour elle.

Les voix se sont intensifiées dans ma tête et je me suis écroulé, à bout de souffle. Je sentais mon corps brûler de l’intérieur. L’eau s’est répandue dans toute ma poitrine et bientôt, je n’ai plus senti ma cuisse, ni ma jambe blessée. Ne plus respirer était le dernier de mes soucis. Ce n’était même pas ce qui me tordait de douleur. Ma peau s’est durcie, je le sais car je ne pouvais plus bouger. Est-ce que j’ai quitté mon corps, est-ce que je suis parti ? Je ne sais pas. A un moment donné, je n’ai plus rien senti. Tout ce que j’entendais, c’était des voix hurler, des épées s’entrechoquer et Eve m’appeler. Ou du moins cette femme, jadis, hurlant le nom de Garin. On revient toujours à ses premiers amours, il paraît. Il semblerait que je n’en ai jamais connu qu’un.

Toutes mes mémoires se sont confondues. Celles que j’avais oubliées, celles dont je me souvenais, celles dont il me manquait des pièces, celles dont le puzzle était complet. On suppose que tout est noir quand on disparaît de la terre. J’ai une autre version à vous soumettre…
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Abel Henoch
Abel Henoch
Abel se souvenait parfaitement avoir souvent eu envie d’étriper Garin, sans jamais passer le pas. Evidemment… Et maintenant qu’il avait une bonne raison de le faire, il hésitait. Eve absente, il ne se sentait pas le droit de le faire, même si c’était parfaitement justifié. Garin les avait mis en danger, et le meilleur moyen d’empêcher la police, le FBI ou les anciens employeurs de Garin, la CIA, de se rapprocher d’eux, c’était de leur offrir un cadavre. Ils se douteraient tous que Garin n’était pas mort tout seul, mais les hypothèses seraient suffisamment nombreuses pour garder Liberation en sécurité. Et un cadavre serait moins dangereux que Garin vivant. Les flics poseraient des questions.
Mais comment pourrait-il expliquer cela à Eve quand elle reviendrait ? Elle lui en voudrait, à n’en pas douter. Elle le détesterait même. Sans doute. Mais il n’avait pas le choix. Il avait beau retourner le problème dans tous les sens, il ne voyait pas d’autre issue.

Elle ne se souvient même pas de toi.

« Elle ne se souvient pas de toi non plus. » Lacha Abel doucement. Il n’exprimait aucune émotion, il pouvait même paraitre étonnamment détaché. C’était plus ou moins le cas. Il avait un devoir à accomplir. Maintenant que sa décision était prise, rien ne l’empêcherait d’aller au bout. « Peu importe ce que vous avez partagé, ou ce que tu crois avoir en commun avec elle. Tu es un danger pour elle, maintenant. C’est à moi de la protéger. » Il avait échoué pas mal à ce travail, ces derniers temps… Mais ça, c’était quelque chose qu’il pouvait faire. Il ne pouvait pas sortir Eve de l’Underground maintenant qu’elle était amnésique et que l’Underground constituait sa seule famille connue. Il ne pouvait pas l’empêcher de faire des bêtises, peu importait lesquelles. Il devait compter sur d’autres - sur Maddison - pour ca. Mais empêcher que la CIA ne se mette sur leurs traces était encore dans ses cordes. Et ce n’était pas que Eve qui était concernée. Annie, Jason, Gen, Jericho, Libby… ils étaient tout aussi exposés si les forces américaines se mettaient sur la piste de Garin. Abel n’avait pas le choix.

« Abel… » Il se retourna pour voir que Annie était sortie de la caravane.
« Retourne là bas, Annie ! Tu n’as pas à t’en mêler. C’est à moi de le faire. Va… cherche moi la voiture. Maintenant ! »
Annie hésita, mais quand Abel se redressa et que son regard se fit plus dur, elle obtempéra. Elle savait trop bien que Abel ne reculerait pas une fois sa décision prise. Et elle était assez habituée à obéir pour ne pas remettre en question un ordre direct. Elle partit en courant et reviendrait rapidement avec un véhicule.

Abel revint à Garin, mourant. Il n’avait pas réduit la pression de l’eau dans les poumons du jeune homme durant tout ce temps, et Garin continuait de suffoquer.

Je reviendrai toujours pour elle. Reussit-il cependant à lâcher.

Abel serra les lèvres et augmenta la pression de l’eau pour achever Garin. Il ne détourna pas le regard, il lui devait bien ca. Et puis s’il n’était pas capable de supporter l’agonie de celui qu’il avait condamné à mort, il n’avait aucun droit de prendre sa vie. Quand Garin cessa de respirer, Abel s’accroupit à son côté afin de vérifier qu’il était bien mort.
« Moi aussi... » Pour sa soeur, pour Maddison… faisait-il encore une différence ? Il savait ce qu’il était prêt à sacrifier pour elles, il avait veillé sur Eve pendant plus de 20 ans, il avait mis beaucoup de côté pour Maddison. Il espérait que Garin avait été prêt aux mêmes choix douloureux pour le bien de sa bien aimée… C’était au moins ça qu’ils avaient en commun.

Quelques minutes plus tard, Annie revint au volant de la voiture d’Abel. Lorsqu’elle en descendit, elle marqua un temps d’arrêt, et Abel la défia du regard de dire quoi que ce soit. Le regard de la jeune femme - presque une enfant - alla du cadavre à son tortionnaire, mais elle finit par choisir de se taire. Pourtant, l’accusation dans son regard était on ne pouvait plus clair. Il faudrait du temps à Annie pour lui pardonner - si tant est qu’elle lui pardonnât un jour.

« On va le mettre dans le coffre et le laisser quelque part en Ville Basse. Ils le trouveront, tôt ou tard. Il pourront clore l’incident des docks. Et ne risqueront pas de remonter jusqu’à nous. » Annie eu un petit hochement de tête peu convaincu. « On n’a pas le choix. »
« Peut être… »

Elle lui passa à côté sans le regarder, et Abel lacha un soupir discret. Ensemble, ils embarquèrent effectivement le corps de Garin dans la voiture et firent la route jusqu’à la Ville Basse en silence. Ils trouvèrent une ruelle isolée où ils l’abandonnèrent, plus ou moins planquer entre une benne à ordures et un vieux container. Abel s’assura que personne ne les avais vu avant de reprendre le volant et de les ramener au Sanctuaire. Dans le même silence de plomb. Lorsqu’il déposa Annie chez elle, elle descendit de la voiture sans rien dire, ni un regard. Abel serra les lèvres et poussa un autre soupir. Faire des choix n’était jamais facile. Il fallait juste espérer faire le bon à chaque fois. Celui qu’il venait de faire ne ferait pas exception.
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